Trouver des histoires (cinéma, séries, romans et même livres pour enfants et dessins animés maintenant) dans lesquelles il y a au moins une voire plusieurs femmes « rebelles », antipatriarcales, féministes, qui prennent leur vie en main toussa toussa ça devient aujourd’hui faisable voire facile, et vraiment tant mieux. Ca change les repères pour les petites, jeunes et moins jeunes filles et femmes. Et pour leurs compagnons du même âge sur la conscience de différents possibles féminins aujourd’hui. Je peux regarder des films et séries avec mes filles qui leur montrent des modèles féminins actrices de leur vie. C’est top.
Mais que regarder avec mon puis mes fils? Ces mêmes séries montrent principalement les hommes (à part un en général) comme violents, relationnellement, physiquement voire sexuellement, ou en position d’être dominés par d’autres hommes violents si ce n’est pas leur comportement propre. Ce n’est pas ça que j’ai envie de montrer à mes fils ni ce à quoi j’aimerais qu’ils s’identifient. Si on veut changer les choses, il faut aussi changer les modèles pour garçons et hommes. Féministes bien sûr mais aussi et surtout biens dans leur corps et leur tête avec toutes les facettes de leur personnalité, y compris celles dites habituellement « féminines », dans leur vie masculine.

Il nous faut maintenant des histoires et modèles dans lesquels les hommes montrent leurs côtés dits « féminins » de manière majoritaire ds l’histoire, et pas seulement des anti-héros épisodiques. Des histoires dans lesquelles les rapports homme-femme sont équilibrés, passionnés mais respectueux, dans lesquelles les hommes et pères sont attentifs et expriment leur « care » de manière naturelle, en même temps que leur force utilisée pour construire et non détruire. C’est indispensable pour que les garçons, jeunes et moins jeunes hommes puissent se construire en se disant que c’est ça la normalité et qu’elle est atteignable. C’est indispensable pour changer réellement de paradigme et de société. Agir sur les modèles féminins ET masculins, en les décloisonnant, en mixant les compétences et valeurs habituellement genrées pour les « dé-genrer ».

Même si les choses changent (doucement) ds les familles et s’éloignent progressivement des clichés, comment les garçons et hommes peuvent-ils se construire facilement en accueillant leur propre sensibilité et humanité quand les modèles cinématographiques (sans parler des modèles politiques et autres modèles publics) sont encore en mode archaïque?

Ce que j’observe chez les lycéen.ne.s actuel.le.s c’est que le féminisme est une base naturelle pour voir le monde. Bon, peut-être pas partout mais c’est le cas ds le lycée de mes filles, y compris chez leurs amis garçons, et des amis profs commencent à l’observer au collège aussi. Que les filles aient droit à avoir les même droits que les mecs c’est OK. Qu’il n’y ait pas à les violenter c’est OK au moins en théorie, que les femmes soient absentes de l’orchestre symphonique de Vienne devient visible et remarqué spontanément par les jeunes lors du visionnage d’une vidéo de concert, qu’une femme devienne vice-présidente des US est remarqué en positif etc.

Mais ce qui est encore absent c’est comment vivre sa sensibilité simplement humaine en tant que garçon et homme sans déclencher les foudres ou rires ou rabaissements de la part des autres (hommes et femmes) de tout âge. Comment, en tant que jeune garçon en école élémentaire, pouvoir choisir la couleur de ses habits en fonction de ses envies du jour, orange, jaune, bleu, violet, rose, rouge ou arc-en-ciel, sans craindre de remarques négatives parfois encore très violentes de la part des autres enfants et de leurs mères (je ne cite pas les pères car majoritairement absents aux sorties d’école, je n’ai pas leur point de vue là-dessus si tant est qu’ils aient conscience du sujet). Comment, garçon devenant adolescent en collège, pouvoir bouquiner en public, refuser les jeux et remarques sexistes, dessiner en public, courir joyeusement avec filles et garçons sans ballon (mon dieu! sans ballon de foot!!) sans passer pour un « faible ». Comment pouvoir en sécurité exprimer le fait d’être touché par l’environnement, par la beauté, par la douceur, par le besoin de faire des câlins simples à ses pairs, filles et garçons. Comment, en lycée, pouvoir pleurer quand on est touché devant un film ou un témoignage de situation difficile, comment être reconnu légitime lorsqu’on rapporte la parole de quelqu’un en difficulté qu’on a écouté (car oui, les hommes aussi peuvent savoir écouter réellement sans juger ni inventer), comment pouvoir choisir de mettre un peu de maquillage pour cacher ses gros boutons d’ado, comment même mettre une jupe de temps à autre parce que c’est ça qu’on a envie ce jour-là sans être convoqué immédiatement ou traité de tous les noms par les adultes sans même avoir un temps d’écoute (vécu récent d’un ami de mes enfants adolescents). Comment, simplement en tant qu’être humain, genré homme, pouvoir être reconnu légitime de s’indigner du stock de bagnoles pourries au bord des ruisseaux, comment pouvoir être contre la chasse et les sports mécaniques dans un patelin où c’est encore la norme culturelle, comment ne pas se faire démonter par les autres hommes lorsqu’on accorde foi à la parole d’une femme fût-elle d’un niveau hiérarchique différent du nôtre etc.

Dans les cours d’écoles, dont l’organisation de base est genrée si l’on n’y change rien consciemment, les jeunes garçons qui ne correspondent pas aux critères standards dits « masculins » sont également victimes des stéréotypes de genres. Ils subissent des discriminations souvent violentes de la part des autres garçons. Parce que les normes d’aspect et de comportement sont intégrées dès le plus jeune âge.

Les cours de récréation sont aménagées de façon à ce que les filles — et les enfants non « conformes », par exemple ceux en surpoids —, ne se sentent pas légitimes à occuper l’espace. Ce qui, dès l’enfance, remet en cause une égalité de droit, celle entre les femmes et les hommes. Sous couvert de cela se noue la question des garçons qui ne jouent pas au foot, et que l’on va traiter de filles. Le sexisme est lié à l’homophobie. On se fait traiter d’homosexuel ou on se fait traiter de fille. C’est le même processus : celui qui fait la part belle à la domination et à l’hétéro-normativité, un processus d’infériorisation qui est lié au fait d’être perméable au monde des filles.

Edith Maruéjouls https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/09/16/dans-les-cours-de-recreation-les-filles-sont-invisibilisees_5355861_3224.html

A l’adolescence, l’aspect physique est un atout ou un frein à l’expression de la sensibilité des garçons: les garçons et jeunes hommes ayant un physique dit « dominant » pourront plus facilement exprimer leurs facettes sensibles car l’aspect extérieur de « force » les protège des réactions négatives. Mais les plus « gringalets », ou à démarrage de croissance plus tardive, restent en retrait et sont plus facilement en danger physique et social s’ils montrent leurs composantes sensibles. C’est surtout de ça qu’il y a besoin ds les représentations sociales et culturelles nouvelles: que les garçons et hommes puissent être vus comme légitimes dans toutes les facettes intimes de leur personnalité, dans l’expression de leur sensibilité simplement humaine, au même titre que les filles.

Alors, script.e.s modernes égalitaires à pensée divergente, à vos stylos!!

Hommes bienveillants et complets à sensibilité vivante: rendez-vous visibles!!

#feminisme #cinema #creationculturellemoderne #scenario
#hommebienveillant (moins de 1000 publications avec ce hashtag me dit facebook, tout un programme justement …) #quandestcequonchange