Finis ton assiette !

Notre chère Mme Déjantée proposait cette semaine, sur la page Facebook des Vendredis Intellos, de commenter un article qui m’a beaucoup intéressée. Un article qui traite du « problème » des repas, de la nourriture, du comportement alimentaire de nos chères têtes blondes. L’article en question est disponible ici.

J’avoue que l’article m’a ramenée quelques années en arrière, à la table familiale, je me souviens avoir passé quelques têtes à têtes avec mon assiette froide et un réveil car il fallait absolument que je termine le contenu de la dite assiette ! J’en ai gardé de très mauvais souvenirs et j’ai toujours eu un rapport particulier avec la nourriture, je suis toujours dans l’excès, soit trop, soit trop peu mais j’ai du mal à atteindre un juste milieu.

Quand nous avons commencé à diversifier ma fille, nous nous sommes posés des dizaines de questions et ce qui s’est imposé à nous c’est finalement que le mieux pour elle, selon nous, était de la laisser choisir et de l’écouter. Après tout, elle savait déjà très bien nous faire comprendre quand elle souhaitait téter et quand elle en avait assez.

Alors, c’est vrai, partout on entend, ne pas manger trop de sucres, manger 5 fruits et légumes par jour, ne pas manger trop salé… Pour les enfants, c’est encore pire, tant de grammes de légumes verts, tant de grammes de poisson, de féculent etc. Comme cela est précisé dans l’article : « Dans la littérature scientifique et dans les médias, on aborde souvent l’alimentation sous l’angle de l’importance des nutriments, vitamines et minéraux » ainsi que dans la thèse de Geneviève Dulude présentée au Département de Nutrition de la Faculté de Médecine de Montréal.

L’auteure de la thèse cherche à démontrer que les habitudes alimentaires de l’enfant – futur adulte – prennent racine dans la façon qu’à le parent de lui présenter la nourriture : « C’est le parent qui assure la disponibilité des aliments, choisit les repas, devient un modèle dans l’acte alimentaire et interagit avec son enfant en guidant le comportement de ce dernier à table. »

Geneviève Dulude a donc menée une étude sur une centaine de familles et les résultats sont assez édifiants. Beaucoup de parents déclarent que le repas est un moment désagréable, ponctué de disputes, la télévision y est souvent associée. Il paraît donc évident qu’une mauvaise ambiance à table est un mauvais point. Si l’on ajoute à cela des obligations quant à certains aliments comme celle de terminer son assiette avant de pouvoir sortir de table, il paraît logique que l’enfant associe les repas et les aliments proposés à ce moment à une expérience désagréable qu’il n’a pas envie de renouveler. Il se tournera donc naturellement vers des aliments « plaisir » comme les biscuits, les bonbons, les chips …

Geneviève Dulude conseille donc aux parents d’abandonner ces pratiques et de mieux répartir les pouvoirs entre eux et leur enfant. «Le parent choisit le contenu du repas, l’heure et l’endroit, alors que l’enfant sélectionne ce qu’il mange sans être contraint, puni ou récompensé. Cela devrait alléger l’ambiance des repas et permettre à l’enfant de découvrir à son rythme les nouveaux aliments. Des études nous apprennent qu’un enfant a parfois besoin de 15 contacts avec un aliment avant d’accepter d’y goûter. Il faut par conséquent persévérer et faire preuve de patience en acceptant de se débarrasser à l’occasion d’assiettes à peine entamées!»

C’est ainsi que nous avons personnellement décider de procéder avec notre Poulette. Nous choisissons en amont des aliments les meilleurs possibles (nous avons pris un abonnement dans une AMAP et avons nous mêmes découvert et redécouvert certains aliments qui nous paraissaient mauvais dans nos souvenirs d’enfance et que nous apprécions désormais) et c’est elle qui choisis ensuite lesquels elle désire manger et en quelle quantité. Si, pour quelque raison que ce soit, elle ne veut pas manger plus de cuillerées, nous ne la forçons pas et lui proposons éventuellement un autre aliment ou une autre activité. Nous lui faisons confiance comme nous nous faisons confiance quand notre corps nous donne envie d’un aliment précis lors d’une maladie ou d’une grossesse…

Et c’est ainsi que nous constatons avec plaisir qu’elle s’intéresse de plus en plus aux aliments. Grâce au portage également, nous la faisons participer à la confection des repas, ce qui, selon moi, est un moyen supplémentaire de l’intéresser à la nourriture comme source de plaisir et de créativité. Nous lui faisons confiance et la laissons expérimenter comme elle le souhaite tout en contrôlant les choix en amont. La télévision ne fait pas partie des repas pour faire de ce moment un vrai moment de partage et de retrouvailles familiales. Et j’espère bien que, comme l’étude de Mme Dulude l’a démontré, ma fille aura un rapport sain avec la nourriture et n’aura pas de problèmes de surpoids dus à des grignotages.

Nadinbox

15 réflexions sur “Finis ton assiette !

  1. Mardi soir j’étais à une conférence organisée par l’asso de parents dont je fais partie (La Cause des Parents, s’il y a des lyonnaises) sur le thème du repas, intitulée justement « le repas, un moment de plaisir partagé ».
    La conférencière, qui dirige une crèche s’appuyant sur l’approche Pikler-Loczy, insistait effectivement sur cette notion de plaisir, et sur l’inutilité des conflits autour de la nourriture, qui sont généralement perdus d’avance.
    Elle proposait également de laisser les enfants choisir ce qu’ils veulent manger (parmi ce qui est proposé, ça n’implique pas forcément de laisser l’enfant choisir le menu), et aussi pour les petits, l’ordre dans lequel ils veulent manger le repas, ou la façon dont ils veulent le manger (morceaux ou purée, avec les doigts, avec la cuillère, tout seul ou donné par le parent, assis à table ou sur les genoux, etc.)

    Elle a aussi pas mal parlé des retours en arrière, ou des périodes de refus de tel ou tel aliment. C’est vrai que c’est frustrant, ici par exemple l’ainée (4 ans) commence tout juste à sortir d’une grande période de refus des légumes, qui a duré de 2 à 4 ans grosso modo (alors qu’avant 2 ans, elle mengeait de tous les légumes avec plaisir). Moi personnellement, j’ai du mal à lâcher prise là-dessus, je laisse faire 2-3 repas, et puis au bout d’un moment je m’inquiète et insiste un peu plus pour qu’elle mange un peu des légumes. 7

    Dans tous les cas, moi je suis convaincue que la notion de plaisir autour du repas est capitale, et même si j’attache de l’importance à proposer des repas équilibrés, ça n’est pas au détriment du goût, du plaisir pris à préparer et partager les plats, etc.
    d’où mon blog ;-)

    • Ahlala comme je t’envie… en ce moment pour moi les conférences de la MPN c’est niet!! Rien que de songer monter sur le plateau me donne l’impression de gravir la chaîne de l’Himalaya… (ceci était ma minute de lamentation baleinesque…!! ;) ). Merci pour le compte rendu en tout cas!!!

  2. J’en avais parlé déjà sur ce blog des problèmes d’alimentation. On en passe tous par là à un moment où un autre.
    Les pédiatres, et les médias ont une approche très scientifique de l’alimentation. On a l’impression que si les bébés ne mangent pas x grammes de légumes accompagnés de x grammes de viande, x ml de lait dans la journée, ils seront en mauvaise santé, ils ne grandiront pas et ne grossiront pas comme il faut. La société nous inculte une phobie de l’obésité alors que bon nombre de nos enfants en sont bien loin. On se met donc une pression pas possible. Je me souviens pour mon ainée, dès qu’elle ne mangeait pas de légumes à un repas, la tension montait, comme si tout son avenir en terme de santé dépendait de chaque bouchée ingurgitée…
    Résultat, nous avons eu de gros problèmes de nourriture avec elle depuis ses 18 mois. Depuis qu’on a changé d’attitude et de stratégie, elle en vient elle même à demander à goûter des légumes. C’est encore rare, elle ne mange pas de fruits et légumes à chaque repas, mais elle est en pleine forme, très grande, et bien que très mince sa santé n’a pas l’air d’en pâtir…
    On ferait mieux de mettre l’accent sur le plaisir du repas en donnant les quantités de chaque aliment à titre indicatif, d’objectif qu’il n’est pas indispensable d’atteindre…

  3. Super article! je suis d’accord, chaque fois que la télé s’en mêle, ça devient plus difficile. Etre paisible et à l’écoute au moment des repas, c’est souvent un travail de longue haleine. pourtant, qu’est ce qu’on est bien quand tout se passe bien, et on retrouve une confiance réciproque!

  4. Pingback: Artikeul-Roll pour les Vendredis Intellos #2 « Sauterelle Box

  5. Merci beaucoup de ta contribution!! et merci d’avoir accepté de nous commenter cet article!!! Je suis comme toi persuadée que nombre de troubles alimentaires viennent de la façon dont les aliments et les repas nous ont été présentés enfant… Je ne suis d’ailleurs pas certaine que la centration actuelle sur les problèmes de poids plutôt que sur l’éducation au goût et le repérage de la sensation de satiété soit une bonne chose….
    J’ai pu par exemple constater quel conséquence à eu la suppression du goûter de 10 heures à l’école sur l’appétit de mes enfants: au lieu de pouvoir croquer une pomme et arriver tranquillement au repas à midi, ils y arrivent totalement affamé avec une seule idée en tête: manger vite et le plus possible!!! Même l’APA qui pourtant n’est habituellement pas très intéressé par la nourriture demande du rab de peur d’avoir faim… Je n’arrive vraiment pas à voir l’intérêt du dispositif…!

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