Les vrais besoins de votre bébé [Bibli des VI]

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Quels sont les « vrais » besoins des nouveaux-nés ? En toute simplicité, Bernadette Lavollay revient aux bases de la physiologie de la naissance pour redonner confiance aux jeunes parents dans leur capacités à comprendre leurs bébés et à leur répondre.

Allaitement, pleurs, sommeil, soins de puériculture, que faire ? Ces questions, beaucoup de parents se les posent et il n’est pas évident de faire le tri parmi les dizaines d’injonctions contradictoires émanant de l’entourage familial, amical, médical ou médiatique. Les conseils apportés aux jeunes mères et pères ont diamétralement varié selon les époques, ce qui n’est pas sans inspirer une certaine défiance. Coucher l’enfant sur le ventre, ou sur le dos, pourquoi pas sur le côté ; allaiter au sein ou au biberon ; dormir avec son enfant ou au contraire le placer dans sa chambre le plus tôt possible ; le laisser pleurer ou pas… Pédiatre pendant 40 ans, Bernadette Lavollay se base sur sa pratique en maternité et sur les apports scientifiques récents pour faire le tri dans les préceptes, conseils, recettes et recommandations en tout genre. Elle pose ainsi les bases d’un accueil bienveillant, fondé sur les compétences des bébés et des parents.

Le but de ce livre est de vous faire connaître, mères et pères, tous les besoins de votre nouveau-né, toutes ses compétences et toutes vos ressources de parents pour l’accueillir et répondre à ses besoins. Mon intention est aussi de faire tomber les craintes et les barrières qui empêchent la rencontre sereine avec votre bébé. Notre culture nous encombre de préceptes, de recommandations, de recettes, de conseils au milieu desquels parents et professionnels de la petite enfance sont perdus. Je souhaite vous aider à trouver votre chemin dans la rencontre de votre nouveau-né, le chemin de l’attachement profond qui portera cet enfant dans la sécurité et la confiance pour toute sa vie.

Stop au « diktat de la séparation précoce »

Pendant des années, les nourrissons ont été accueillis dans ce que l’auteur nomme le « diktat de la séparation précoce ». « Laisse le pleurer, si tu y vas à chaque fois ça va lui donner des mauvaises habitudes. » ou « Ne le prends pas tout le temps dans tes bras, tu vas le rendre capricieux. » étaient alors des conseils courants. Ils sont encore très répandus.

Pourtant, aujourd’hui sécurité et bien-être sont considérés comme des besoins fondamentaux des nourrissons.

La sécurité, c’est offrir à la mère et au bébé un contexte favorable pour que l’adaptation du nouveau-né à son nouvel environnement se fasse dans les meilleures conditions. On sait aujourd’hui que les bébés nés à terme disposent des compétences nécessaires à leur adaptation, la plupart des gestes médicaux sont donc superflus dans les premières heures. Un bébé placé en peau à peau avec sa mère ou son père aura tout ce dont il a besoin : chaleur, contenance, repères sensoriels, possibilité de téter.

Le bien-être, c’est offrir une réponse aux besoins immédiats du bébé, même s’ils ne sont pas vitaux. « Il s’agit de le faire entrer dans cette nouvelle vie sur un mode doux, confortable, bienveillant, serein, joyeux. » Pas si simple au pays des injonctions éducatives.

D’une logique « action-réaction » à une logique « désir-plaisir ».

Autour des besoins du bébé, de nombreuses croyances existent, qui varient selon les cultures. Dans nos sociétés occidentales, ces croyances sont souvent fondées sur des principes éducatifs de contrôle, d’autonomie, de performance.

On entend par exemple que les pleurs sont les seuls moyens d’expression d’un bébé. On considère donc que pleurer leur « fait les poumons », que c’est inévitable. L’ouvrage nous montre que les tout-petits disposent en fait de toute une panoplie de moyens d’expressions, les pleurs étant le plus extrême de ces moyens. Les bébés nous parlent avec leurs gestes, la coloration de leur peau, leurs mimiques… Être attentif à ces signes c’est tenter de se brancher sur le même canal que son bébé pour lui répondre avant qu’il ait besoin de s’époumoner.

Les théoriciens de l’attachement (John Bowlby, Mary Ainsworth, Donald Winnicott, Thomas Berry Brazelton…) ont aussi montré que les pleurs sont une des stratégies du bébé pour « s’attacher » ses parents : il cherche leur aide, leur soutien, leur empathie, et ce, pour forger ce socle de sécurité sur lequel il s’appuiera toute sa vie. Ce n’est donc pas parce qu’un bébé a mangé, qu’il est propre et qu’il n a a priori mal nulle part qu’il ne faut pas le prendre dans ses bras.

Finalement, quelles que soient les raisons des pleurs, chacun trouvera ses moyens d’apaisement, souvent très simples, fondés sur ses propres besoins et ceux du bébé, plutôt que sur les exigences d’une société « hypercorticalisée », où le rationnel prime sur l’émotionnel. Pour Bernadette Lavollay, il faut changer de paradigme, d’une logique « action-réaction » à une logique « désir-plaisir ».

Pour les parents, « c’est un travail de patience, d’attention, d’oubli de soi, de lâcher-prise, d’abandon de ses propres préoccupation, bref, de don. » Autant de compétences émotionnelles laissées de côté, que les jeunes parents doivent apprendre à (ré)investir.

L’instinct maternel, ça existe ?

« Vous, surtout les mères, avez un sixième sens pour ressentir, au fond de vous, le message lancé par votre bébé. »

D’après Bernadette Lavollay, ce fameux sixième sens qui permettrait aux mères de comprendre naturellement leurs bébés existe vraiment.

C’est peut-être vrai si on ne s’attache qu’à ce cocktail d’hormones présent dès la grossesse, puis pendant et après l’accouchement, qui permet à l’attachement de se faire, à la mère de développer une empathie particulière vis à vis de son bébé, de régresser elle-même pour se mettre au diapason de son enfant.

Si l’auteure parle bien des difficultés de nos sociétés à entourer les mères, idéalisant au passage les cultures dites primitives, elle oublie complètement le processus de naissance psychique. S’oublier, lâcher-prise, se donner, tout cela demande des ressources intérieures importantes et un entourage présent. Cet ouvrage empreint d’un féminisme pour le moins essentialiste nous laisse entendre que les mères sentent, ressentent, savent ce dont ont besoin leurs bébés. L’instinct maternel existerait donc.

C’est oublier les 80 000 femmes qui chaque année en France éprouvent des difficultés majeures à investir leur identité de mère. Certaines vivent des grossesses parfaites, accouchent physiologiquement, allaitent et portent leur enfant, mais elle ne ressentent pas d’instinct maternel, parfois pas d’amour, pas d’attachement. Ces chiffres sont suffisants pour affirmer que l’instinct maternel, symbole de la maternité heureuse, n’existe pas.

Au delà de ce manquement, cet ouvrage synthétique ouvre des perspectives pour une autre relation au bébé. Depuis les années 1950, les parents ont été soumis à la toute-puissance de la puériculture. Il faut donner le bain de telle manière, contrôler les tétées, changer les couches selon un protocole bien précis. Cet ouvrage nous invite à ouvrir les yeux sur les véritables besoins de nos tout-petits, pour une relation moins technique et plus humaine.

Les vrais besoins de votre bébé, Bernadette Lavollay, éditions Les Arènes, 2018, 313 pages

La daronne perchée

5 réflexions sur “Les vrais besoins de votre bébé [Bibli des VI]

  1. L’instinct maternel a toujours existé mais il est plus ou moins émoussé par le contexte environnemental et sociétal. Personne ne dirait que l’instinct de survie n’existe pas au prétexte que des centaines de personnes se suicident.

    • Euh…. je me demande bien sur quelles sources vous vous basez pour dire une chose pareille. Parmi les thèses pour expliquer « pourquoi les bébés pleurent » certains pensent que la vigueur des cris des bébés est une manière de signaler à sa mère qu’il était suffisamment vigoureux pour survivre et donc, qu’il était utile qu’elle s’investisse dans des soins. Justement l’instinct de survie parlons en: dans un contexte où la nourriture est rare et la vie difficile, je ne vois pas bien en quoi il aurait été un avantage évolutif de s’investir dans les soins à tous les nouveaux nés. De fait, il est probable que beaucoup de mères des temps préhistoriques (ou de cette fameuse société « non émoussée par le contexte environnemental et social », si tant est qu’elle ait existé!) aient eu à abandonner leurs nouveaux nés, pour survivre elles-même ou faire survivre leurs enfants plus âgés.

  2. Pour moi, l’instinct maternel au sens « d’impulsion spontanée, automatique et invariable qui régit le comportement de tous les individus d’une même espèce » selon la définition du Larousse n’existe pas. L’élan qui porte les mères vers leurs bébés n’est ni spontané, ni automatique, ni invariable. Et je pense que c’est le cas dans toutes les sociétés. C’est pourquoi les rituels entourant la naissance sont si importants, et permettent de réduire la prévalence de la dépression post-partum dans les cultures où ces rituels sont encore bien présents. La femme ne devient pas mère de manière innée, mais se construit mère avec l’étayage de son entourage familial et sociétal. Je ne remets pas en cause le fait que certains éléments biologiques facilitent l’attachement mais ils ne font que faciliter, pas garantir.

  3. Il me semble que la grossesse, l’accouchement, « avoir un enfant », « devenir parents », sont un creuset de remaniements psychiques pour tous. Particulièrement les parents qui « adviennent » plutôt que ne « sont » même si la loi les inscrit rapidement, cadre qui participe d’ailleurs à ce devenir en cours, cet être en cours je pense. Nous avons chacun reçu ce qui a pu/voulu être donné/offert/transmis…et nous ferons ce que nous pourrons à deux, seul, entourés ou pas, dans tel pays/société/culture…..
    Je ne sais pas comment on peut définir l’instinct maternel et parler de la même chose mais « élan » est un mot porteur, traversant les parents en cours de devenir et qui n’est en effet parfois pas au RV ou décalé.
    Donc pour moi je trouve qu il est important de ne pas batailler sur un mot, de ne pas nier non plus les hormones et autres, il suffirait peut être de se dire que ce devenir est toujours unique, remuant, mais que nous avons tous les compétences, des compétences et qu’elles se créent à mesure de la rencontre avec cet enfant, DANS la rencontre de cette personne à naître, née, et au milieu du fameux village du proverbe africaine.
    Je suis lasse des pro et des antis. Je refuse de nier l’instinct s’il est cet élan imparfait dans la rencontre d’un autre qui dirait juste que nous avons tous en nous la capacité potentielle, les compétences, ensemble, à deux, parfois seul (e) et ensemble…et dans le cadre des véritables réactions biologiques associées. Qui, comme en épigénétique, indique que TOUT EST POSSIBLE ET CIRCONSTANCIé et que TOUT éVOLUE non ??
    La vie est mouvement, la relation aussi.
    En fait je souhaite une chose : qu’on se rappelle de la SINGULARITé, nous sommes uniques, il peut y avoir de la place pour tout le monde. Devenir parent est une aventure, une merveilleuse aventure épuisante souvent, un cauchemar, pour faire dans la binarité, pour d’autres (réalité médicale grave parfois). Mais je préfère employer d’autres termes comme rencontre/cheminement/co-construction/équilibrage, ajustement, dans l’infini variété des vécus et histoires. Beaucoup de parents sont portés par l’évidence et l’amour inconditionnel, ce n’est pas un gros mot de le dire et c’est toujours imparfaits, et certains ne ressentent rien sur le moment ou à plus ou moins long terme, en souffrent ou pas, et peuvent aussi avoir besoin de temps de tolérance, et besoin de trouver leur équilibre, leur solution, leur histoire, ou ne rien vouloir en savoir aussi…..
    Au final il me semble qu’il n’y a que des routes, des chemins se faisant en cheminant (je n’ai plus la phrase du poète Garcia Lorca qui parlait du « caminando »), des rencontres, des tissages, des coutures, des tâtonnements, des essais des erreurs….à sa façon singulière pour chacun, pour chaque couple, pour chaque relation avec l’enfant, pour chaque groupe et d’ailleurs ce portage du groupe est en effet souvent particuliers de nos jours et dans notre société sans temps ni respiration parfois, sans possibilité de découvrir et explorer, ressentir et advenir à son rythme, en toute liberté, en toute singularité.

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