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Quels sont les « vrais » besoins des nouveaux-nés ? En toute simplicité, Bernadette Lavollay revient aux bases de la physiologie de la naissance pour redonner confiance aux jeunes parents dans leur capacités à comprendre leurs bébés et à leur répondre.

Allaitement, pleurs, sommeil, soins de puériculture, que faire ? Ces questions, beaucoup de parents se les posent et il n’est pas évident de faire le tri parmi les dizaines d’injonctions contradictoires émanant de l’entourage familial, amical, médical ou médiatique. Les conseils apportés aux jeunes mères et pères ont diamétralement varié selon les époques, ce qui n’est pas sans inspirer une certaine défiance. Coucher l’enfant sur le ventre, ou sur le dos, pourquoi pas sur le côté ; allaiter au sein ou au biberon ; dormir avec son enfant ou au contraire le placer dans sa chambre le plus tôt possible ; le laisser pleurer ou pas… Pédiatre pendant 40 ans, Bernadette Lavollay se base sur sa pratique en maternité et sur les apports scientifiques récents pour faire le tri dans les préceptes, conseils, recettes et recommandations en tout genre. Elle pose ainsi les bases d’un accueil bienveillant, fondé sur les compétences des bébés et des parents.

Le but de ce livre est de vous faire connaître, mères et pères, tous les besoins de votre nouveau-né, toutes ses compétences et toutes vos ressources de parents pour l’accueillir et répondre à ses besoins. Mon intention est aussi de faire tomber les craintes et les barrières qui empêchent la rencontre sereine avec votre bébé. Notre culture nous encombre de préceptes, de recommandations, de recettes, de conseils au milieu desquels parents et professionnels de la petite enfance sont perdus. Je souhaite vous aider à trouver votre chemin dans la rencontre de votre nouveau-né, le chemin de l’attachement profond qui portera cet enfant dans la sécurité et la confiance pour toute sa vie.

Stop au « diktat de la séparation précoce »

Pendant des années, les nourrissons ont été accueillis dans ce que l’auteur nomme le « diktat de la séparation précoce ». « Laisse le pleurer, si tu y vas à chaque fois ça va lui donner des mauvaises habitudes. » ou « Ne le prends pas tout le temps dans tes bras, tu vas le rendre capricieux. » étaient alors des conseils courants. Ils sont encore très répandus.

Pourtant, aujourd’hui sécurité et bien-être sont considérés comme des besoins fondamentaux des nourrissons.

La sécurité, c’est offrir à la mère et au bébé un contexte favorable pour que l’adaptation du nouveau-né à son nouvel environnement se fasse dans les meilleures conditions. On sait aujourd’hui que les bébés nés à terme disposent des compétences nécessaires à leur adaptation, la plupart des gestes médicaux sont donc superflus dans les premières heures. Un bébé placé en peau à peau avec sa mère ou son père aura tout ce dont il a besoin : chaleur, contenance, repères sensoriels, possibilité de téter.

Le bien-être, c’est offrir une réponse aux besoins immédiats du bébé, même s’ils ne sont pas vitaux. « Il s’agit de le faire entrer dans cette nouvelle vie sur un mode doux, confortable, bienveillant, serein, joyeux. » Pas si simple au pays des injonctions éducatives.

D’une logique « action-réaction » à une logique « désir-plaisir ».

Autour des besoins du bébé, de nombreuses croyances existent, qui varient selon les cultures. Dans nos sociétés occidentales, ces croyances sont souvent fondées sur des principes éducatifs de contrôle, d’autonomie, de performance.

On entend par exemple que les pleurs sont les seuls moyens d’expression d’un bébé. On considère donc que pleurer leur « fait les poumons », que c’est inévitable. L’ouvrage nous montre que les tout-petits disposent en fait de toute une panoplie de moyens d’expressions, les pleurs étant le plus extrême de ces moyens. Les bébés nous parlent avec leurs gestes, la coloration de leur peau, leurs mimiques… Être attentif à ces signes c’est tenter de se brancher sur le même canal que son bébé pour lui répondre avant qu’il ait besoin de s’époumoner.

Les théoriciens de l’attachement (John Bowlby, Mary Ainsworth, Donald Winnicott, Thomas Berry Brazelton…) ont aussi montré que les pleurs sont une des stratégies du bébé pour « s’attacher » ses parents : il cherche leur aide, leur soutien, leur empathie, et ce, pour forger ce socle de sécurité sur lequel il s’appuiera toute sa vie. Ce n’est donc pas parce qu’un bébé a mangé, qu’il est propre et qu’il n a a priori mal nulle part qu’il ne faut pas le prendre dans ses bras.

Finalement, quelles que soient les raisons des pleurs, chacun trouvera ses moyens d’apaisement, souvent très simples, fondés sur ses propres besoins et ceux du bébé, plutôt que sur les exigences d’une société « hypercorticalisée », où le rationnel prime sur l’émotionnel. Pour Bernadette Lavollay, il faut changer de paradigme, d’une logique « action-réaction » à une logique « désir-plaisir ».

Pour les parents, « c’est un travail de patience, d’attention, d’oubli de soi, de lâcher-prise, d’abandon de ses propres préoccupation, bref, de don. » Autant de compétences émotionnelles laissées de côté, que les jeunes parents doivent apprendre à (ré)investir.

L’instinct maternel, ça existe ?

« Vous, surtout les mères, avez un sixième sens pour ressentir, au fond de vous, le message lancé par votre bébé. »

D’après Bernadette Lavollay, ce fameux sixième sens qui permettrait aux mères de comprendre naturellement leurs bébés existe vraiment.

C’est peut-être vrai si on ne s’attache qu’à ce cocktail d’hormones présent dès la grossesse, puis pendant et après l’accouchement, qui permet à l’attachement de se faire, à la mère de développer une empathie particulière vis à vis de son bébé, de régresser elle-même pour se mettre au diapason de son enfant.

Si l’auteure parle bien des difficultés de nos sociétés à entourer les mères, idéalisant au passage les cultures dites primitives, elle oublie complètement le processus de naissance psychique. S’oublier, lâcher-prise, se donner, tout cela demande des ressources intérieures importantes et un entourage présent. Cet ouvrage empreint d’un féminisme pour le moins essentialiste nous laisse entendre que les mères sentent, ressentent, savent ce dont ont besoin leurs bébés. L’instinct maternel existerait donc.

C’est oublier les 80 000 femmes qui chaque année en France éprouvent des difficultés majeures à investir leur identité de mère. Certaines vivent des grossesses parfaites, accouchent physiologiquement, allaitent et portent leur enfant, mais elle ne ressentent pas d’instinct maternel, parfois pas d’amour, pas d’attachement. Ces chiffres sont suffisants pour affirmer que l’instinct maternel, symbole de la maternité heureuse, n’existe pas.

Au delà de ce manquement, cet ouvrage synthétique ouvre des perspectives pour une autre relation au bébé. Depuis les années 1950, les parents ont été soumis à la toute-puissance de la puériculture. Il faut donner le bain de telle manière, contrôler les tétées, changer les couches selon un protocole bien précis. Cet ouvrage nous invite à ouvrir les yeux sur les véritables besoins de nos tout-petits, pour une relation moins technique et plus humaine.

Les vrais besoins de votre bébé, Bernadette Lavollay, éditions Les Arènes, 2018, 313 pages

La daronne perchée