Maman, regarde, mon prénom, c’est Crocodile

Depuis deux ans, Progéniture ne raconte rien de l’école. Tout au plus Rayan l’a-t-il poussée dans la cour et Chloé lui a piqué son serre-tête.

« Tu as dessiné aujourd’hui ? »
« Je sais pu. »
« OK »

Alors, le jour de la rentrée en grande section, on imagine ma surprise quand elle nous expliqua

« Maman, en classe, pour dire non à Christopher, on fait comme ça : Le signe pour dire non en LSF en vidéo. »

Elle nous explique alors longuement que Christopher n’entend pas, alors il parle en geste, et le mercredi il va dans une école spéciale. On ne l’arrête plus.

Toute fière, je lui montre le seul signe que je connaisse : Bonjour, et l’encourage à le dire le lendemain.

Deux jours plus tard elle m’explique qu’il lui a pas répondu et que je dis n’importe quoi. OK. J’ai donc un accent pourri en LSF (langue des signes française), je ne vois pas d’autre explication.

Lors de la réunion de rentrée, l’institutrice a expliqué les apports de la LSF pour la compréhension du langage par les enfants. Les gestes, très imagés, permettaient une bonne prise de conscience de certains concepts. Elle a notamment donné l’exemple du mot Hier : Le signe pour dire hier en LSF en vidéo.

Depuis, il ne se passe pas un jour sans quelle nous apprenne un mot/signe. La maitresse enseigne des comptines signées. Les enfants se sont choisi leur prénom en signe. Donc Progéniture, son prénom, c’est  Crocodile.

C’est la classe, regardez plutôt : Le signe pour dire crocodile en LSF en vidéo.

En conclusion, j’en étais persuadée, mais je suis ravie de constater que la scolarisation en milieu ordinaire des enfants handicapés n’est pas une aumône que nous leur faisons, mais bien une opportunité pour l’ensemble de leur classe d’âge.

Article L112-1 du Code de l’éducation

[…] Le service public de l’éducation assure une formation scolaire, professionnelle ou supérieure aux enfants, aux adolescents et aux adultes présentant un handicap ou un trouble de la santé invalidant. Dans ses domaines de compétence, l’Etat met en place les moyens financiers et humains nécessaires à la scolarisation en milieu ordinaire des enfants, adolescents ou adultes handicapés.

La Tellectuelle

12 réflexions sur “Maman, regarde, mon prénom, c’est Crocodile

  1. Génial !!! une expérience valorisante pour tout le monde : ouverture, sensibilisation au handicap, apprentissage de la différence, découverte de cette capacité à communiquer par les mains !
    Merci pour ce partage :) et félicitations à Crocodile !

  2. Merci beaucoup de cette contribution enthousiasmante!!! Même constat ici sur la scolarisation des enfants porteurs de handicap: l’an dernier la classe de PMH a accueilli un enfant autiste et j’ai vraiment eu le sentiment que c’était positif pour tout le monde…
    Sinon sur la question des sourds et malentendants, j’ai aussi entendu parlé de « langage parlé complété » qui semble distinct de la LSF mais j’avoue ne pas trop saisir les enjeux de l’un ou de l’autre…

    • Il me semble que c’est la distinction entre les sourds, qui sont capables de parler et de compléter avec des signes, et les sourds-muets, qui ne peuvent que signer

    • Le LPC est un code manuel autour du visage complété de la lecture labiale.

      Le code se compose de huit configurations de main pour représenter les consonnes ainsi que de cinq emplacements sur le visage pour représenter les voyelles. La combinaison de la position et de la forme de la main constitue l’image visuelle de la syllabe prononcée et permet à l’interlocuteur de différencier, par exemple, le bain, le pain, la main qui sont trois mots parfaitement identiques sur les lèvres, on parle alors de sosies labiaux.

      Le code LPC permet donc de différencier des phrases où la lecture labiale est la même. Les exemples suivants, où la lecture labiale est la même, peuvent être différenciés par le LPC :
      Il mange des frites
      Il marche très vite

      (source Wikipédia)

      La langue des signes LSF a sa propre syntaxe (verbe à la fin par exemple).

      La différence entre LSF et LPC réside dans le fait d’oraliser ou non. La personne qui utilise la LSF signe uniquement, la personne qui utilise le LPC peut être sourde mais parle.

  3. C’est une belle histoire et je suis sˆure également que la présence de cet enfant est bénéfique pour tout le monde : pour lui, pour qu’il apprenne à se faire comprendre de tous, suive un cursus normal, ne soit pas marginalisé etc ; pour ses camarades à qui cela apporte des richesses et du savoir en plus…

    • Et de la tolérance, parce que le chemin est long : Progéniture m’a dit hier « Moi j’aime pas les sourds ».
      J’en suis restée comme 2 ronds de flanc, elle venait de me montrer 2 nouveaux mots !

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