Avec l’émancipation des femmes, la contraception et l’évolution des moeurs, la maternité n’est plus un destin mais un choix. Les progrès scientifiques bouleversent aujourd’hui la réalité biologique de la maternité. Est-on mère par l’ovule, par l’accouchement, par la volonté ? Une question à laquelle la société n’a pas fini de répondre.

Voici la phrase sur laquelle débute cet article paru sur le site Sciences Humaines et qui m’a interpellé. Et cette question est à la source de nombreux débats, déjà tranchés ou en cours (l’adoption, la gestation pour autrui, l’homoparentalité, l’accouchement sous X, etc.)

Comme indiqué dans cet article, à l’origine, la réponse paraît simple et la réponse y est biologique. Mais dans notre société, la maternité n’est plus uniquement la fonction biologique, c’est également :

[…] une construction sociale, définie et organisée par des normes, selon les besoins d’une population donnée à une époque donnée de son histoire

Cette reconnaissance de la maternité comme une construction sociale est récente.

Une ribambelle de mesures dans les années 1920 et 1930 concrétisent alors la reconnaissance par l’Etat de la fonction maternelle : fête des Mères (1926), assurance maternité (1928), allocations familiales (1932), « allocation de la mère au foyer » (1938)… La glorification par le régime de Vichy de la figure de la mère, seul horizon digne pour la femme, n’est en cela pas une rupture mais l’apogée de cette politique nataliste. Amer revers : la reconnaissance des mères a sans doute retardé la reconnaissance des droits civils et politiques des Françaises qui ne voteront pour la première fois qu’en 1945.

Puis dans les années 70, une nouvelle révolution s’amorce. Les femmes ne veulent plus êtres vues uniquement comme des mères au foyer potentiel mais veulent se réapproprier leur corps.

Grâce à l’accès à la contraception médicale en 1967 et à la libéralisation de l’avortement en 1975 acquise au prix d’âpres luttes, le slogan « Un enfant si je veux quand je veux » devient une réalité. La maternité contrainte laisse place au désir d’enfant et ouvre une véritable révolution de la parenté.

Ce n’est donc plus la biologie qui détermine le fait d’être mère.

Cela ne peut pas être les gènes qui définit la mère. Sinon, on ne pourrait pas reconnaître la maternité des mères adoptantes. On ne pourrait pas non plus autoriser les accouchements sous X qui suppriment justement la filiation entre cet enfant biologique et sa mère.

Cela ne peut pas être l’accouchement qui définit la mère. L’adoption est encore un contre exemple. Dans d’autres pays on pourrait aussi donner comme contre exemple les mères porteuses même si cet exemple ne peut pas être utilisé en France (de manière légale).

Dans certains cas, on peut en effet distinguer trois mères : celle qui a le désir d’enfant, celle qui apporte l’ovule et celle qui porte le fœtus et accouche. Dans la législation californienne ou israélienne, est considérée comme mère de plein droit la mère commanditaire, celle qui a voulu être mère. La maternité est alors rattachée non à un principe corporel mais à une relation morale : la volonté.

Ce serait donc la volonté qui donne le statut de mère. Même si la conception d’un enfant n’est pas toujours voulu, on peut dire que dans la majorité des cas le garder l’est. Et on ne peut pas douter un instant de la volonté dont fait preuve les mères d’enfants adoptés ou issus de procréation médicalement assisté.

Cet article ouvre également la perspective sur une évolution possible de cette volonté de séparer le biologique de la volonté :

La prospective permet d’aller plus loin encore dans ce questionnement. Dans un récent ouvrage, L’Utérus artificiel (6), le biologiste Henri Atlan montre que la prochaine étape des bouleversements introduits par le progrès scientifique sera sans doute l’ectogenèse, c’est-à-dire la gestation en dehors du corps humain. L’utérus artificiel ne serait pas une chimère mais pourrait voir le jour dans un délai de cinquante à cent ans.

Pour certains, remplacer la période de grossesse par une incubation dans une sorte de matrice serait le seul moyen pour atteindre l’égalité entre les hommes et les femmes. Cela me fait froid dans le dos. Quelle implication cela aurait-il sur les enfants issus d’une matrice « froide » et dénuée d’émotions, de sentiments, etc… Peut-on dire que les échanges (autres que physiologiques) entre la « porteuse » (puisque le fait de porter un enfant ne crée pas automatiquement le lien de filiation) et l’enfant pendant 9 mois n’ont aucune importance ?

Ayant porté 3 enfants, cela me paraît inconcevable. La relation entre mes enfants et moi ce sont noués dès la grossesse. Mais dans ce cas, je dois me rendre à l’évidence que l’on ne peut nier le lien qui uni un enfant et sa mère porteuse. C’est sûrement cela également qui fait que je ne peux concevoir la gestation pour autrui et que j’en avais déjà parlé sur mon blog.

Et une fois qu’on aura décidé de faire de l' »élevage » avec nos enfants, ne vaudra-t’il mieux pas également les faire éduquer par des tiers ? Par des professionnels qui ne feront pas les erreurs que tout jeune parent se doit de faire ? Ainsi sera t’on certain que ni la mère ni le père ne seront pénalisés par cette descendance !

Quel est pour vous ce qui « fait » une mère ? Je ne réduirais pas comme ici cela à la volonté. Comme je l’avais expliqué ici, j’ai voulu mes enfants, mais pendant chaque grossesse, j’ai eu besoin de construire cette relation avec ce nouvel enfant et elle se construit chaque jour. Et je pense que ce sont ces deux critères qui font la maternité : la volonté et la construction au jour le jour de cette relation privilégiée. Et chose merveilleuse, les pères et les mères ont ça en commun, et voilà pour moi comment on les remet sur un pied d’égalité…

Madame Koala