J’aimerais parler aujourd’hui d’une question qui me tient à cœur. J’aimerais grâce à cet article faire tomber les idées reçues et les clichés. J’aimerais changer le regard des gens sur des enfants différents que notre société néglige souvent et que l’on jalouse parfois, parce qu’on estime qu’ils sont « plus » et que plus c’est mieux.

Je sais, je suis utopiste… Mais j’aimerais, au moins essayer aujourd’hui, en vous parlant des enfants dits précoces, surdoués, à haut potentiel et que Jeanne Siaud-Facchin, dans son livre L’Enfant surdoué : L’aider à grandir, l’aider à réussir, appelle des Zèbres.

L'enfant surdoué

Pourquoi « Zèbre » ?

 

Dans ce livre, Jeanne Siaud-Facchin emploie le terme de Zèbre pour parler des enfants surdoués. Ce terme a été, depuis, repris par de nombreux parents d’enfants surdoués et par des surdoués eux-mêmes, afin d’éviter les terminologies habituelles, à savoir :

  • Enfant intellectuellement précoce (EIP) : terme officiel en France, qui laisse entendre que ces enfants sont simplement en avance sur leur âge mais que cela ne se verra plus à l’âge adulte. Ce qui est faux, un enfant surdoué sera un adulte surdoué, à vie (sauf accident).
  • Surdoué : terme qui véhicule avec lui pas mal de clichés de petit génie et dont l’étymologie même laisse entendre que ces enfants sont plus doué, qu’ils ont reçus plus que d’autres,
  • Haut potentiel (HP) : terme qui peut mettre une certaine pression à l’enfant… s’il a un potentiel, et a fortiori un haut potentiel, il se doit de l’utiliser.

Jeanne Siaud-Facchin a donc choisi le mot « zèbre » pour parler de ces enfants possédant un fonctionnement intellectuel différent.

Le zèbre n’est-il pas le seul animal sauvage que l’homme n’a pu domestiquer ? Son pelage rayé n’est-il pas destiné à jouer avec les ombres et la lumière pour mieux se dissimuler mais soudain apparaître dans toute sa splendeur en se détachant, par ses rayures, de tous les autres animaux de la savane ? Et n’a-t-on pas l’habitude de parler d’un drôle de zèbre pour désigner un individu original, peu banal ?

A quoi ça ressemble un Zèbre ?

 

Chaque enfant est différent, Zèbre ou pas, mais ces enfants ont un fonctionnement intellectuel et des traits de personnalité particuliers.

 

Un QI bien supérieur à la moyenne

Le Zèbre a un quotient intellectuel (QI) bien supérieur à la moyenne. On parle généralement de surdoués à partir d’un QI supérieur à 130.

Le QI n’est pas une mesure absolue, c’est une échelle : dans la population le QI moyen est égal à 100.
68% des personnes ont un QI situé entre -15 et + 15 par rapport à la moyenne (donc avec un QI entre 85 et 115) et on arrive à 95% si l’on prend un écart de -30 / +30 (donc entre 70 et 130). Seul environ 2,1% de la population a un QI > 130, soit près de 450 000 enfants en France.

Courbe QI

Pour les enfants, le QI est calculé par rapport aux enfants du même âge. Il évolue donc peu au cours d’une vie.

 Un score de QI autour de 130 aux tests d’intelligence validés et standardisés est habituellement retenu. Le QI n’est pas une « mesure » de l’intelligence, mais une évaluation des capacités intellectuelles d’un enfant par rapport à un enfant du même âge.

Mais le QI ne fait pas tout.

Le QI doit être considéré comme un indicateur qui va guider et orienter le diagnostic mais qui devra être complété par d’autres facteurs et signes cliniques.

Un fonctionnement intellectuel différent

Les Zèbres ont un mode de pensée différents, ils pensent autrement :

  • Ils ont un système de pensée en arborescence : la pensée foisonne tout le temps, chaque donnée se divisant en nouvelles idées qui s’associent rapidement et simultanément, quand le reste des gens fonctionne avec une pensée linéaire et plus structurée.
  • leur cerveau droit est prédominant, à l’inverse du reste de la population. Ils sont donc plus intuitifs, plus créatifs, plus émotifs,
  • leur mémoire est plus importante (autant à court terme qu’à long terme),
  • leur vitesse de transmission et de traitement des données est plus élevée,
  • ils ne perçoivent pas les implicites et prennent les mots au pied de la lettre (ce qui peut créer de gros malentendus et être pris pour de l’insolence ou de la provocation),
  • ils ont besoin de tout comprendre, de percevoir le sens et la précision de tout,
  • ils ont un raisonnement logico-mathématique très différent, ce qui leur permet souvent d’être très à l’aise en mathématiques mais sans savoir comment ils sont arrivés au bon résultat.

Être surdoué ne signifie pas être plus intelligent que les autres mais fonctionner avec un mode de pensée, une structure de raisonnement différente. L’intelligence de l’enfant surdoué est atypique. C’est cette particularité qui rend souvent difficile son adaptation scolaire mais aussi son adaptation sociale.

Des particularités sur le plan affectif

Les petits Zèbres présentent des caractéristiques affectives communes, à savoir :

  • L’hypersensibilité : leurs 5 sens sont plus développés et les informations sensorielles sont traitées plus rapidement. Leurs émotions en sont donc exacerbées (inquiétude, peur, anxiété, enthousiasme, colère…) ainsi que leur susceptibilité et leur sens de la justice.
  • L’empathie : leur capacité à ressentir l’état émotionnel de l’autre est plus développée. Ils savent ainsi mieux adapter leur comportement et communiquer avec autrui, mais cela peut générer aussi chez eux une bonne dose d’anxiété (anticipation anxieuse).
  • La lucidité : ils portent un regard très lucide sur le monde qui les entoure et, notamment sur ses fragilité, ce qui, là encore, génère de l’anxiété et empêche tout « lâcher prise ».

L’enfant surdoué perçoit et analyse avec une acuité exceptionnelle toutes les informations en provenance de l’environnement et dispose de la capacité étonnante de ressentir avec une grande finesse l’état émotionnel des autres. Véritable éponge, l’enfant surdoué est, depuis toujours, littéralement assailli par des émotions, des sensations, des informations multiples qu’il lui est le plus souvent difficile de vivre, d’intégrer et d’élaborer.

Jeanne Siaud-Facchin rappelle que ces caractéristiques sont aussi importantes dans le diagnostic des petits Zèbres que leur fonctionnement intellectuel et qu’elles pèsent autant dans la construction de leur personnalité.

Les enfants surdoués ont, bien souvent, du mal à se construire une image de soi et à avoir une bonne estime de soi.

Ils sont différents de la majorité, ils ne correspondent pas à ce que l’on attend habituellement d’un enfant et ils sont souvent victimes d’incompréhension de la part des gens qui les entourent.

Ils ont donc du mal à se situer entre ce qu’ils ressentent et ce que les autres leur renvoient. Ils peinent à se construire une identité manquant de modèles identitaires et étouffent parfois, de manière plus ou moins intentionnelle, leur singularité pour rentrer dans le moule.

Tout cela est d’autant plus vrai, et difficile, s’ils ne sont pas dépistés (d’où la nécessité de le faire le plus tôt possible).

Cette différence, que l’auteur met en parallèle avec la différence des enfants qui sont à l’autre extrémité de la courbe de QI (les déficients intellectuels), n’est pas sans poser souci au quotidien et à l’école…

Cécile de La Cour des petits