Les Danois-e-s sont les champion-ne-s du monde du bonheur :  premiers au Rapport mondial sur le bonheur 2016, troisièmes au Rapport de 2015,  premiers à l’Indicateur du vivre mieux OCDE – Satisfaction 2015, premiers à l’enquête sociale européenne 2014…  et ce n’est qu’un aperçu du palmarès !

Comme la Suède, la Norvège et la Finlande, le Danemark bénéficie d’un État providence très efficace et d’une société civile qui se porte bien. Ce qui pourrait différencier le Danemark des autres pays nordiques, c’est le hygge.

Le hygge (prononcé hou-ga) est un art de vivre à la danoise ; si l’on voulait traduire, c’est un mélange de confort, de bien-être, et de convivialité. Les petits bonheurs quotidiens et les joies familiales sont érigés comme style, voire comme objectif de vie. Dans son Livre du Hygge, mieux vivre : la méthode danoise, Meik Wiking, Président de l’Institut de recherche sur le bonheur de Copenhague (si, si, c’est un vrai institut de recherche) nous offre une immersion dans ce mode de vie.

A mi-chemin entre la rubrique lifestyle (recettes de plats danois, inspiration du design hygge, adresses « hyggeligt » de Copenhague) et développement personnel (le bonheur est-il simple comme une tasse de chocolat chaud ?), Le Livre du Hygge  s’interroge sur le lien entre bonheur et hygge, dresse un inventaire de tout ce qu’est le hygge, et donne des clés pour s’inspirer du Danemark dans la vie de tous les jours.

Si l’intérieur et l’hiver se prêtent particulièrement au hygge, il est possible de le vivre partout et par tout temps : explorer la forêt, pêcher dans une rivière, pique-niquer dans un pré… Il s’adapte même à la vie de bureau danoise, où il est courant de partager des gâteaux entre collègues. Meik Wiking propose également un calendrier d’activités hygge mois par mois, qui va d’une soirée ciné en janvier à une soirée gløgg et aebleskiver (vin chaud et gâteaux) en décembre, en passant par la nuit des étoiles en août. Des bougies (les danois en sont les premiers consommateurs européens, et de loin), une boisson chaude, un bon livre ou un bon film, de la chaleur humaine et un brin de madeleine de Proust : voilà le kit de survie du hygge.

L’idée du cocon, du sentiment de sécurité que l’on ressent lorsqu’on est avec des proches est aussi essentiel. On le voit bien dans un moment hygge vécu par Meik Wiking  :

 « Un jour, en décembre, juste avant Noël, je passais un week-end dans un vieux chalet à la montage, entouré d’amis. Le jour le plus court de l’année se réfléchissait sur la couverture de neige blanche du paysage environnant.

Une fois le soleil couché, vers 16 heures, alors que nous ne le reverrions pas avant dix-sept heures, nous sommes rentrés pour allumer un feu.

Nous étions tous fatigués après une randonnée, à moitié endormis, assis en demi-cercle autour de la cheminée, emmitouflés dans de gros pulls et des chaussettes en laine. Les seuls bruits audibles étaient le ragoût qui mijotait, les étincelles du feu et les gorgées de vin chaud que l’un d’entre nous avalait.

C’est alors qu’un de mes amis a brisé ce silence.

« Est-ce que ce moment pourrait être encore plus hygge ? » a-t-il demandé, sans attendre de réponse.

-Oui, a répondu une des filles au bout d’un moment. Si une tempête de neige faisait rage dehors. »

Et nous avons tous hoché la tête. »

En bref, une vie simple, en famille, sans chichis, littéralement sensuelle.

15271511_378599279144998_178651630_o1

@GwenaëlleMontet

En cette période de l’Avent, le hygge est particulièrement indiqué : on retrouve les boissons chaudes, les bougies,  les cheminées,  la période de Noël et les jeux de société au top 5 des choses associées au hygge par les Danois.

« Le hygge est différé afin de pouvoir être atteint pleinement ». Alors on a pris le temps, et on s’est même organisé pour prendre le temps. Et on s’est fait un petit test du weekend hygge hivernal en famille.

Ça a commencé par le marché le samedi matin (pas de révolution pour l’instant, on y va chaque semaine). J’ai choisi les provisions spéciales hygge : de quoi faire un bÅ“uf bourguignon (on dira que c’est l’équivalent du skibberlabskovs, ragoût de viande danois dont la recette est donnée dans le bouquin), du camembert, des Å“ufs pour faire des crêpes. L’après-midi, un petit tour à la brocante de jouets du coin, où je trouve un lot de Popi d’occasion pour mon grand : ça nous fera notre lecture du weekend, dans notre hyggekrog (« coin du hygge » – chez nous le petit canapé plein de coussins de toutes les formes et de plaids tout doux), après avoir réparé les pages déchirées  aussi méticuleusement que le peuvent une maman pas très versée en arts manuels et un petit de 3 ans qui découvre la paire de ciseaux. Selon Meik Wiking, « plus l’acte ira à l’encontre de la société de consommation, plus il sera hyggeligt » : je pense qu’on est en plein dedans ! Puis on allume des bougies, on accueille un couple d’amis et leurs enfants pour une session crêpes – cidres – courses de petites voitures – bébés qui crapahutent. L’ambiance est là, même si ce n’est pas facile d’atteindre le bien-être ultime avec les enfants qui crient (de joie, certes).

Le dimanche, c’est grasse matinée – non je rigole, les enfants se lèvent à 7h, comme toujours. Pendant que le petit est à la sieste, je me lance dans la cuisson du bourguignon et de la purée de céleri. Le papa en profite pour faire découvrir des tours de magie à notre aîné. A 11h30, le bourguignon glougloute, monsieur le cadet se réveille : c’est décoration du sapin de Noël ! On est plus fort que les Danois, on n’a pas besoin de bougies pour profiter de ce bon moment. Après le repas, sieste dominicale, puis préparation de cupcakes pour le goûter. On ne peut malheureusement pas les déguster devant un bon feu de cheminée (appartement francilien oblige), mais le sucre et les rires partagés suffisent à nous réconforter.

Je précise tout de suite : oui, il y a eu des cris pendant ce weekend, des mini crises de larmes, non le hygge n’est pas une méthode de parentalité à part entière. Mais oui, ça fait du bien. On reprend des forces, on finit la semaine avec de bons souvenirs, des câlins, des sourires : un véritable hyggestund, un « moment de pur hygge ».

Le Livre du Hygge est un joli bouquin, au graphisme soigné, au texte facilement abordable. Il peut être lu rapidement, pour le plaisir. On peut aussi piocher dedans quelques idées décoration, cuisine, voyage. Pour ma part, j’ai essayé d’intégrer un peu plus de hygge dans mon quotidien. La France est pour l’instant très loin du Danemark sur l’échelle du bonheur. Mais si on oubliait cinq minutes les palmarès, classements, sondages, statistiques, et qu’on se laissait aller un peu, le hygge pourrait émerger, nous envahir de douceur…et le bonheur naître, tout simplement.

Ce livre est à présent disponible dans la Bibliothèque volante des Vendredis intellos , et peut être emprunté par les adhérent-e-s à l’association qui souhaitent le consulter.

Madameld

[edit 8 décembre 2016 : ajout d’une citation]