Chères lectrices et lecteurs de VI,
après une pause où j’ai défendu le dit-mémoire (17/20 !), je suis partie en week-end, j’ai été absorbée par la vie et je reviens enfin avec la suite de ma réflexion sur la bienveillance à l’école.

Ici je dresse un simple constat de ce qui nous est demandé dans ces textes qui font la norme, et qui sont prescriptifs quant à notre manière d’enseigner.

La bienveillance, volonté institutionnelle ?

Les programmes de la maternelle 2015
Dès le premier paragraphe, le ton est donné : « L’école maternelle est une école bienveillante,
plus encore que les étapes ultérieures du parcours scolaire. Sa mission principale est de
donner envie aux enfants d’aller à l’école pour apprendre, affirmer et épanouir leur
personnalité. Elle s’appuie sur un principe fondamental : tous les enfants sont capables
d’apprendre et de progresser. En manifestant sa confiance à l’égard de chaque enfant,
l’école maternelle l’engage à avoir confiance dans son propre pouvoir d’agir et de penser,
dans sa capacité à apprendre et réussir sa scolarité et au-delà. » (Bulletin officiel spécial n°2
du 26 mars 2015, p. 1). Il s’agit d’accompagner les enfants dans leur épanouissement, en
facilitant la transition école-maison, en mettant le jeu et l’évaluation positive au coeur des
apprentissages. L’école est le lieu d’apprentissage du vivre ensemble en devenant élève, cela
en réalisant des expériences, des tentatives, en prenant des initiatives et en apprenant à faire
des choix, en confrontant ses essais à ceux des autres enfants, en apprenant à être attentif aux
autres et aux consignes et à renoncer à ses envies immédiates (de jeu). La continuité et
l’objectif des enseignements sont énoncés et compris par les enfants, tout comme ils peuvent
être en mesure de questionner, discuter, justifier et expliciter, en prenant conscience des
différentes étapes de l’apprentissage. Enfin, les enfants peuvent évaluer par eux-mêmes leur
travail grâce à des critères de réussite précis. (Bulletin officiel spécial n°2 du 26 mars 2015, p.
3)

Les programmes de l’école primaire
Aux cycle 2, 3 et 4
Dans les programmes 2015 des cycles 2, 3 et 4, la mention du terme de bienveillance et de
posture bienveillante de l’enseignant est systématiquement mentionnée dans la partie
consacrée au cadre des principes généraux de l’enseignement moral et civique.
« Cet enseignement a pour objet de transmettre et de faire partager les valeurs de la
République acceptées par tous, quelles que soient les convictions, les croyances ou les choix
de vie personnels. Ce sont les valeurs et les normes impliquées par l’acte même d’éduquer
telle qu’une école républicaine et laïque peut en former le projet. Elles supposent une école à
la fois exigeante et bienveillante qui favorise l’estime de soi et la confiance en soi des
élèves, conditions indispensables a` la formation globale de leur personnalité. Cet
enseignement requiert de l’enseignant une attitude à la fois compréhensive et ferme. A
l’écoute de chacun, il encourage l’autonomie, l’esprit critique et de coopération. Il veille à
éviter toute discrimination et toute dévalorisation entre élèves » (Bulletin officiel spécial n°10
du 19 novembre 2015, pp. 54, 162, 299). La bienveillance s’articule donc dans un cadre
exigeant et rigoureux, aussi bien dans le rapport élève-enseignant que dans le groupe classe
sous l’oeil et l’écoute attentifs de leur enseignant.


Au cycle 2 (soit CP, CE1, CE2)
Dans la la partie décrivant la spécificité du cycle 2 :
« La classe s’organise donc autour de reprises constantes des connaissances en cours
d’acquisition et si les élèves apprennent ensemble, c’est de façon progressive et chacun à
son rythme.
(…)
Au cycle 2, les connaissances intuitives tiennent encore une place centrale. En dehors de
l’école, dans leurs familles ou ailleurs, les enfants acquièrent des connaissances dans de
nombreux domaines : social (règles, conventions, usages), physique (connaissance de son
corps, des mouvements), de la langue orale et de la culture. Ces connaissances préalables à
l’enseignement, acquises de façon implicite, sont utilisées comme fondements des
apprentissages explicites. Elles sont au coeur des situations de prise de conscience, où l’élève
se met à comprendre ce qu’il savait faire sans y réfléchir et où il utilise ses connaissances
intuitives comme ressources pour contrôler et évaluer sa propre action (par ex. juger si une
forme verbale est correcte, appréhender une quantité, raisonner logiquement) ». (Bulletin
officiel spécial n°10 du 19 novembre 2015, pp. 4-5)
Au cycle 2, l’apprentissage est progressif, le rythme de l’enfant est respecté, tout en travaillant
en groupe, et de concert avec la classe. Les compétences sont construites sur les acquis
précédents, dites intuitives. Elles sont rationalisées par un processus réflexif. Cette
rationalisation s’appliquerait aussi au social et donc aux relations à autrui.
Dans la section de situation d’écriture: “L’appui sur des remarques toujours bienveillantes
relatives au texte initialement produit, sur des échanges avec un pair a` propos de ce texte est
une étape indispensable avant une activité autonome.” (Bulletin officiel spécial n°10 du 19
novembre 2015, p. 20). Les remarques toujours bienveillantes devraient accompagner chaque
échange entre l’enseignant et son élève.


Au cycle 3 (CM1, CM2, 6ème)
« En gagnant en aisance et en assurance dans leur utilisation des langages et en devenant
capables de réfléchir aux méthodes pour apprendre et réaliser les tâches qui leur sont
demandées, les élèves acquièrent une autonomie qui leur permet de devenir acteurs de leurs
apprentissages et de mieux organiser leur travail personnel.
(…)
De manière plus générale au cycle 3, les élèves accèdent à une réflexion plus abstraite qui
favorise le raisonnement et sa mise en oeuvre dans des tâches complexes. Ils sont incités à
agir de manière responsable et à coopérer à travers la réalisation de projets, à créer et à
produire un nombre significatif d’écrits, à mener à bien des réalisations de tous ordres.
(…)
Ils sont conduits à développer le sens de l’observation, la curiosité, l’esprit critique et, de
manière plus générale, l’autonomie de la pensée. »
(Bulletin officiel spécial n°10 du 19 novembre 2015, p. 92)
Au cycle 3, la réflexivité des élèves semble être systématisée et étendue sur des compétences
sociales de coopération et d’appréhension des processus d’apprentissage et du monde.

Les recommandations aux jeunes enseignants.
Dans le livret repères et conseils du professeur stagiaire du 1er 2015-2016, il n’est pas fait
mention explicite de la bienveillance à l’école. L’enseignant a nombre d’obligations aussi
bien au niveau de l’éthique professionnelle que de respect des programmes et des directives.
Dans la partie portant sur la classe, il est spécifié que l’enseignant doit prendre du recul sur
son propre savoir, son rapport aux élèves et sa pratique. Mais nulle indication pratique ou
mode d’emploi. Dans le livret, il est uniquement mentionné qu’en jonglant entre les situations
d’apprentissage et les projets, l’enseignant doit « instaurer des relations », « s’adapter aux
sollicitations affectives des uns et des autres, avec la nécessaire retenue pédagogique », tout
en ayant une connaissance fine du contexte de vie des enfants, et en adaptant son
enseignements aux « stratégies cognitives » et aux intérêts de chacun (ESPE Académie de
Versailles, p. 32).

Olivia Bek