La rentrée est déjà derrière nous et normalement, tout s’est bien passé, dans une grande majorité de cas. Oui sauf pour certains, qui ne se sentent pas bien, qui partent la boule au ventre et pour qui, la situation peut perdurer, voire empirer au point parfois de n’être plus capables de mettre un pied à l’école, au collège, au lycée, voire plus loin.

Je vais, pour la première fois, évoquer une des plus pénibles périodes de ma vie : elle fait écho, encore après plus de 30 ans (oups, c’est que je prends de l’âge), à une bonne dose de douleur, d’intense souffrance. Je crois que j’avais plus ou moins enfoui cela au plus profond de moi parce qu’une certaine honte y est associée, et parce que comme tout le monde,  je n’aime pas ressasser des souvenirs trop pénibles.
N’y allons pas par 4 chemins : j’ai eu une année de 6e horrible ! Pas moyen de partir le matin sans sentir monter de grosses vagues d’angoisse, des tonnes de larmes et les nausées qui me clouaient le ventre pendant toute la durée du voyage maison-collège et souvent même après. Je passais ma première heure de cours, chaque lundi matin, à me cacher derrière mon cahier pour pleurer.
Alors, au début, tout le monde vous tend la main, cherche à comprendre : profs, copains, parents, famille… puis après, si les symptômes persistent au-delà du premier mois de l’année scolaire, l’entourage en a marre,  vous laisse généralement tomber, voire vous « ordonne » d’être fort(e), d’aller mieux … car ce n’est pas NORMAL !
A 10 ans, vivre de pareils moments de grande solitude, de stress et de chagrin, ce n’est juste pas tolérable.
J’ai subi les affres de ce qu’on appelle la « phobie scolaire » et ce, pendant toute l’année… Heureusement, j’ai appris à me faire confiance, à faire confiance aux autres et petit à petit, tout est rentré dans l’ordre mais nous étions déjà fin mai. Ça ne se finit pas toujours aussi bien pour tout le monde.

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Pourquoi je me remets à évoquer ce sujet maintenant ? Parce que ma fille vient de rentrer en 6e et pour l’instant, elle suit mes traces : nausées, perte d’appétit, angoisses tous les matins. Elle n’avait jamais manifesté pareils malaises auparavant dans sa scolarité, toujours épanouie et adorant les apprentissages. J’ajoute que les symptômes sont absents le week-end et le mercredi. Bref, j’ai l’impression de tout revivre une seconde fois et c’est d’autant plus douloureux que je me sens impuissante car je sais qu’aucun mot ne peut la rassurer … je sais juste (et c’est déjà pas mal) ce qui ne va pas accentuer l’angoisse.
Bon, rien ne dit que tout ne va rentrer dans l’ordre d’ici quelques semaines, mais je ne peux pas m’empêcher de m’inquiéter et d’être vigilante.

Les phrases qu’elle me dit, je ne les connais que trop bien :
– « J’ai l’impression que je ne vais pas réussir à affronter tout cela*, toute la journée »,
– « j’ai l’impression que je suis toute seule à vivre cela… personne ne sait ce que je ressens »
-« je n’arrive pas à vivre normalement quand je suis là-bas »,
– ‘je ne sais pas vraiment pourquoi j’ai envie de pleurer » …

* « tout cela » comprend : les cours, l’attention, la discipline, les horaires, les remarques, toutes les choses auxquelles il faut penser, ne rien oublier, bien se comporter, bien manger, avoir le temps d’aller faire pipi, ne pas perdre de temps, rester loin de ma mère… et si ceci et si cela ?

Puis je suis tombée sur cet article du dernier numéro de « Cerveau et Psycho » (N°71 – sept-oct 2015) qui évoque ce sujet : « Peut-on vaincre la phobie scolaire ? ». Un article signé O. Dioux,journaliste scientifique, qui donne en plus quelques références de bouquins utiles, pour celles et ceux qui veulent aller plus loin.

On y apprend ainsi que :

 » Entre 1 et 5% des enfants scolarisés sont confrontés à cette peur irraisonnée. Un chiffre en progression selon les professionnels qui les rencontrent dans leur consultation »

« Ce trouble touche indifféremment les filles et les garçons de tous âges, bien que trois pics, correspondant à des périodes de transition, soient observés : entrée à l’école primaire, entrée au collège et autour de 14 ans. »

Les causes de cette peur puissante et incontrôlable
Il peut s’agir d’un réel problème ayant pris racine à l’école (harcèlement, moqueries, menaces…).

Mais la phobie scolaire peut reposer sur d’autres craintes, celle de la séparation (ce fut mon cas) et la crainte de l’échec (dû à un excès de perfectionnisme).
Sur ce dernier point, voici ce que nous livre l’article (propos recueilli auprès de Gisèle George, psychiatre et psychothérapeute)

« La pression de l’école pèse lourd sur les épaules des enfants ».

Je crois que c’est un point fondamental… La pression des profs, des surveillants, du CPE, des parents peut parfois être particulièrement élevée, même pour les élèves brillants. Dans certains collèges, on leur demande encore plus, pour « les pousser au maximum », soit disant. La moindre erreur peut même être sévèrement sanctionnée : c’est ainsi que certains pensent faire progresser l’enfant à son niveau optimal (permettez-moi de douter et d’ailleurs pourquoi cette quête du « meilleur résultat » parfois au détriment du bien-être).

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Comment s’en sortir ?
Côté parents, le maître mot est de  » les aider à relâcher la pression ».

« La confiance en soi est l’antidote au stress »

Mais les parents ne sont évidemment pas les seuls acteurs.

« Les enseignants, le professeur principal et le CPE sont d’une grande aide dans cette recherche des causes. Les parents pourront ensuite se tourner vers un pédopsychiatre ou un centre médico-psycho-pédagogique. Tous devront œuvrer de manière concertée pour améliorer les chances de succès« .

La journaliste nous présente ensuite les bons résultats obtenus par la thérapie cognitivo-comportementale (TCC).

« Grâce à la plasticité cérébrale, les réflexes de peur sont désappris et remplacés par des réactions plus adaptées »

Je pense effectivement que cette solution peut aider. Mais ne place-t-on pas l’enfant, l’adolescent dans un cheminement qui l’amènerait à penser « j’ai un problème ; mon cas n’est pas normal et je dois consulter » ?
La solution serait tellement plus simple si la pression était, dès le départ, moins forte… rêve éveillé, j’en conviens.

Je n’ai pas trouvé vraiment beaucoup d’articles sur ce sujet, ici sur les Vendredis Intellos. Mais je trouve intéressant de relire ce post de DameAndinecogite qui nous parle du mal-être ressenti à l’école dès qu’on sort du moule (ici par exemple). J’insiste sur le formidable message d’espoir qui y est lié  :  » Je rêve d’une école où les enfants puissent aller à leur rythme, sans être jugé « bons » ou « mauvais », que ce soit pour les maths ou pour courir.  »
Je ressors aussi cet article de Cecile de Leo et Melrose qui nous parle du jeu, pour aider les enfants à surpasser leur angoisse. Personnellement, c’est la tactique que je tente le matin avec ma fille… afin de détourner son attention. Je tente aussi d’évoquer un moment sympathique qu’elle a particulièrement apprécié ou un événement réjouissant qui s’annonce (sortie, jeu avec une amie …) .

Voilà, n’hésitez pas à nous faire part de vos avis, de votre expérience, de vos solutions… Je crois que c’est vraiment important d’en parler.

Pascale72