Ces dernières semaines, avec les événements politiques qui sont désormais entrés dans l’Histoire de France, notre monde a subit un gros choc : de l’impression d’être ici, en France, dans un pays sécurisé, une grosse prise de conscience s’est faite, que deux hommes puissent à presque midi en plein centre de Paris, aller tuer plusieurs personnes, protégées pourtant, avec des armes de guerre. La violence du choc, a eu en retour une réaction énorme.

 

J’ai eu besoin de laisser passer un peu d’eau sous les ponts avant de rédiger ce débrief, afin de laisser les choses se poser, prendre un peu de recul.

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Le choc : d’un point de vu médiatique d’abord, où il a d’ailleurs été reproché aux médias de ne pas avoir su garder de distance émotionnelle. Michel Onfray l’a très bien exprimé dans sa tribune (Le Point), où il aborde la question de quoi dire, comment dire les choses, en réussissant à s’affranchir du politiquement correct de nos médias d’aujourd’hui qui ont tendance à vite tomber dans le pathos, au lieu de faire leur travail de véritable information.

 

Ainsi, Chrystelle s’interroge sur la nécessité de parler de ces faits à sa fille de 5 ans : notre président ayant d’une part décidé d’un jour de deuil national le lendemain des attentats, ainsi que d’une minute de silence dans les écoles, pour, vraisemblablement, tous les élèves de France (quelque soit leur âge).

Est ce fondé de demander à des enfants de maternelle de faire « une minute de silence » pour ces attentats ? Est ce fondé de leur en parler ? Chrystelle explique ses interrogations pour finalement en conclure que non, elle n’en parlera pas à sa fille, qui à son jeune âge a bien d’autre chose à penser qu’à ça. Pourquoi, en effet, lui faire porter un tel événement, même expliqué avec des mots adaptés ?

 

D’ailleurs, quelle enfance ces trois hommes ont eu, pour en arriver à faire ce qui ressemble fort à une mission-suicide (quelle chance avaient il de s’en tirer vivants, réellement ?).

C’est la question de Phypa, qui cherche à comprendre ce qui a pu mener ces enfants devenus hommes, vers un destin de tueurs islamiste extrémiste. En cherchant à aller au delà de « les méchants terroristes dont aucune commune ne veut le corps« , c’est l’humanité qu’elle entrevoit en eux. J’avoue avoir été extrêmement choquée cette semaine sur la question du lieu de sépulture d’un de ces terroristes, avec les pays (France et Mali) et les communes (commune de naissance, commune d’habitat, commune de décès) qui se refilent ce corps comme une patate chaude dont personne ne veut. Peut-être que j’attribue une importance « anormale » au droit de sépulture, mais j’ai trouvé ce débat vraiment indigne d’une République.

Phypa pose le doigt là où ça fait mal à notre société : ces hommes, enfants français, qui ont eu, au moins pour les deux frères, une enfance miséreuse, sont aussi des victimes de cette société qui les a abandonné ! La vision des « enfants des cités » toujours considérés comme des looseurs, des destinés au RSA, au chômage : comment s’en sortir lorsqu’on a déjà cette étiquette de « futur perdant ? Heureusement ici et là les choses changent, comme cette prof de 2de/1re qui a relevé les bons mots de ses élèves, alors oui, ça change du vocabulaire classique, mais au fond l’importance est d’utiliser son cerveau, d’avoir de l’humour, quelque soit la forme, c’est une belle illustrations d’intelligence ! Mais encore tant à faire, on revient de loin !

Au fond, cette question entre totalement dans les débats récurrents sur la nécessité de légiférer sur la violence éducative : il est important de transmettre aux enfants qu’ils ont le droit de penser et de s’exprimer par eux même, car s’ils savent qu’ils ont ce droit, il sauront aussi faire preuve d’esprit critique, et peut être, le cas échéant, de ne pas se laisser embrigader comme ces « pauvres mecs » l’ont fait, pour avoir la fin de vie qu’ils ont eux.

Or, notre société actuelle a encore une vision de l’enfant qui devrait juste écouter et fermer sa bouche, juste gober ce qu’on veut lui inculquer sans esprit critique, sans pensée. Comment, dans un tel contexte, peuvent ils ensuite acquérir du jour au lendemain, devenus adultes, la capacité de ne pas prendre comme parole d’Évangile (ou de Coran) tout ce qu’on leur raconte, pourvu que l’emballage soit un tant soit peu séduisant ? La vie est un apprentissage, et le principe de l’apprentissage et de s’exercer, de se tromper parce qu’on apprend, et de mieux faire ensuite en apprenant de ses erreurs. Notre gouvernement saura t’il apprendre de ses erreurs, à travers ces événements dramatiques ?

 

D’ailleurs Pascal72 à travers la question de l’importance de l’expression créative l’illustre très bien : l’expression créative, en plus du dessin, va au delà d’un simple après midi passé assis devant une table. Dessiner c’est exprimer ses émotions, augmenter son imagination et sa créativité, développer ses compétences en psychomotricité, prendre confiance en soi et développer ses capacités d’analyse (et ainsi développer la prise de recul, la capacité au second degré), et enfin dessiner, c’est aussi entrer en interaction avec son entourage (quel enfant n’a pas montré fièrement son premier dessin d’escargot à la moitié de son entourage ?).

Valoriser la créativité de nos enfants, non pas forcement en s’extasiant stupidement devant le moindre coup de crayon, mais valoriser, écouter leurs partages, les mettre en valeur (chez moi, la plastifieuse est ma meilleure amie pour conserver les déjà superbes -objectivement bien entendu – dessins de mes loupiots).

Recevoir leur créativité les encourage à s’ouvrir au monde, et pour être dans une famille très créative, je le constate chez mes enfants, neveux et nièces combien s’ouvrir à l’Art (au sens large du terme) fait qu’ils s’ouvrent à tout esthétisme qui les entoure, on reçoit une telle richesse de partages !

 

Dans la même lancée, Lauradeboutludo partage avec nous sa lecture du livre Oui, la nature humaine est bonne, de Olivier Maurel (l’auteur notamment de La fessée, questions sur la violence éducative).

Il est sidérant en effet que entre 80 et 90% des enfants dans le monde ont reçu des coups de leurs parents ou enseignants !!! Depuis le temps que ça dure, ça se saurait si c’était aussi efficace qu’on le pense !

Lauradeboutludo va au delà d’un jugement potentiel sur le fait de frapper ou pas son enfant. Elle présente surtout les conséquences de cette éducation dans un climat de violence (et que l’on soit clair : on ne parle pas forcement d’enfants battus aux quotidiens, mais d’une société où le fait de taper son enfant, même une fois, est normalisé) sur l’adulte en devenir : un enfant qui a reçu ou été témoins de coup(s) sera moins empathique, en plus d’avoir une vision positive de la violence comme mode d’interaction avec ses congénères. Olivier Maurel sort même du cercle intime de la famille pour analyser les conséquence de ce mode éducatif d’un point de vue politique, économique et social !

Alors si c’est aussi simple, pourquoi ne change t’on pas tout simplement dans notre société pour venir à cet Eden ? Parce qu’il est difficile de sortir d’une telle culture, car elle est normée par les us et coutumes, par les « j’ai reçu des fessées et j’en suis pas mort ! » (on ne meurt pas non plus d’un viol collectif, pourtant personne ne niera les conséquences graves d’un tel acte sur la vie d’une femme ou d’un homme !), et même par la société (il suffit de voir la tv avec Super Nannie ou les livres qui vont dans une vision de l’éducation stricte et déculpabilise les parents qui auront recours à la fessée).

 

Pourtant c’est possible d’en sortir : sortons de cette vision judéo-chrétienne qui voit l’enfant naissant comme un être impure et méchant qui doit être formé pour enfin devenir bon !

Si dés sa naissance on voyait l’enfant comme un être bon, qui a tout à recevoir et à apprendre, que s’il se trompe c’est pour encore mieux apprendre, que s’il fait tomber un verre ça n’est pas pour tenter de nous faire perdre patience, mais juste parce qu’il apprend, encore et toujours !

Si on regarde l’enfant avec un regard bienveillant, que oui parfois il nous teste, mais que répondre par la violence ça ne sert à rien, au contraire, les conséquences potentielles, d’une point de vue sociétal sont trop importante pour qu’on continue à agir de la sorte ! ça ne coûte pas grand chose de voir les choses autrement, et les bénéfices relationnels avec nos enfants sont énormes, en plus de contribuer à ce qu’ils deviennent des adultes avec de belles chances d’avancer en ayant confiance en eux, en nous, sans peur.

 

Sachons écouter ce que nos enfants ont à nous apporter ! Et chacun en sortira grandit, enrichit !

 


 

« Cette conviction que l’homme-en-tant-qu’espèce s’améliore avec le temps vient sans doute d’une confusion inconsciente avec l’homme-en-tant-qu’individu. L’homme est d’abord un enfant avant d’être un adulte. Nous, hommes d’aujourd’hui, nous sommes des adultes. Ceux qui vivaient avant ne pouvaient être que des enfants.

Mais il serait peut-être bon, il serait peut-être temps de se demander si la perfection n’est pas dans l’enfance, si l’adulte n’est pas qu’un enfant qui a déjà commencé à pourrir…
Vous, les enfances de l’homme, vous neufs, vous purs, vous non usés, non fatigués, non déchirés, délabrés, harassés, vous, que ne pouviez-vous pas avec votre intelligence ? »

René de Barjavel, La nuit des temps


 

MamanDragon