Oui, Mesdames (enfin celles qui sont enceintes), vous avez bien lu, votre placenta est un véritable écosystème ! Contrairement à ce que l’on a longtemps cru, il n’est pas du tout stérile et héberge de millions voire des milliards de bactéries. Mais rassurez-vous, c’est pas sale…

Cette découverte a été révélée cette semaine dans une étude parue dans la revue scientifique à comité de relecture Science Translational Medicine. Cette étude indique par ailleurs que ce microbiome placentaire (oui, les scientifiques d’aujourd’hui préfèrent le terme microbiome à celui de flore, ça fait plus sérieux…) est très semblable à celui que les mères ont dans leur bouche, et qu’il vaut donc mieux pour elle avoir une bonne hygiène dentaire, CQFD. Et elle déclare aussi que sa composition diffère lors d’une naissance prématurée.

Alors le placenta, c’est quoi ? Wikipedia te l’explique à ma place  (vas voir, y’a des super images !) :

Le placenta est un organe unique qui connecte physiquement et biologiquement l’embryon en développement à la paroi utérine. Durant toute la grossesse, le placenta apporte à l’embryon puis au fÅ“tus l’eau, les nutriments et le dioxygène dont il a besoin. Il évacue aussi le dioxyde de carbone et les déchets métaboliques tels que l’urée, excrétés par l’embryon.
Le placenta est un tissu fÅ“to-maternel, provenant de la fusion partielle d’un tissu maternel de l’endomètre, et d’un tissu fÅ“tal issu du trophoblaste (donc de la multiplication cellulaire de l’Å“uf), dénommé chorion.

 

Un article du Quotidien du Médecin relate les propos des chercheurs à l’origine de cette découverte :

«  Après avoir terminé nos études sur le microbiome vaginal durant la grossesse, nous avons remarqué que les microbes les plus abondants dans le vagin maternel n’étaient pas ceux peuplant le microbiote intestinal du bébé. Nous avons donc pensé qu’il devait y avoir une autre source « essaimant » l’intestin du bébé à la naissance, aussi nous avons examiné le placenta », explique le Dr Kjersti Aagaard, gyneco-obstétricienne au Baylor College of Medicine (Houston, TX).

Souviens-toi, sur les VI on a déjà parlé de la façon dont les nourrissons se constituent leur propre flore intestinale, microbiome digestif. Dans cet article, je parlais déjà de microbiome, de naissance par voie naturelle ou par césarienne et de possible influence sur le risque d’obésité.
Et donc maintenant, ce que disent le Dr Kjersti Aagaard (je te remets son nom juste pour le plaisir) et ses collègues, c’est que le microbiome digestif d’un bébé se constitue AUSSI à partir du microbiome placentaire !

Et on y trouve quoi alors comme bactéries ? Aagaard et al. ont étudié le placenta de 320 femmes après leur accouchement (certains à termes, d’autres prématurés, certains « sans problème », d’autres où la femme avait eu pendant sa grossesse une infection urinaire, ou pulmonaire etc…). Le Quotidien du Médecin explique :

Parmi les espèces bactériennes les plus abondantes figurent E. coli (une bactérie commensale de l’intestin), ainsi que Prevotellatannerae et des espèces Neisseria non pathogènes (deux espèces de la cavité buccale). De façon surprenante, le microbiome placentaire ne ressemble pas vraiment aux microbiomes du vagin ou de l’intestin, et il se rapproche davantage de celui de la cavité buccale.

Surprise ! Le microbiome placentaire ressemble donc plus au microbiome buccal qu’à celui du vagin ou des intestins. Dans un article de vulgarisation de la revue scientifique Science, on peut lire (je me suis permis de traduire…) :

Les chercheurs pensent que les microbes de la bouche de la mère sont arrivés jusqu’au placenta en passant par la circulation sanguine, peut-être parce que lorsqu’elle se brosse les dents, elle les déloges et les fait pénétrer dans le sang. Cette possibilité est intéressante parce qu’il existe une corrélation bien connue entre des maladies de la bouche et l’accouchement prématuré. D’ailleurs la variétés des bactéries dans le placenta diffère chez des femmes qui ont accouché avant 37 semaines.

 

Voilà, pour l’instant il est encore beaucoup trop tôt pour affirmer quoi que ce soit sur le rôle de ce microbiome placentaire, et encore moins sur son origine (les chercheurs eux même n’excluent pas la possibilité que des bactéries soient présentes dans l’utérus bien avant avant une quelconque fécondation). Ni même de son rôle sur les accouchement prématurés (cause ? effet collatéral ?) Mais ce qui est certain, c’est que cette étude, réalisée dans le cadre du vaste et absolument fascinant Human Microbiome Project, c’est que plus on cherche, apporte de l’eau au moulin à l’idée qu’il n’y a probablement aucun tissu de notre corps qui ne soit stérile… Imaginez un peu, c’est comme si chaque parcelle de votre organisme, chaque cm3 hébergeait autant de diversité biologique que la forêt amazonienne !
Et pour ceux et celles qui n’ont pas peur de lire de la science en anglais, un article très intéressant dans The Scientist après de cette découverte et du microbiome maternel.

 

 

Illustration by Dutch artist Gerard de Lairesse (1641 - 1711) from 'Anatomia Humani Corporis' (1685). © University of Strathclyde, Anderson Collection

Illustration by Dutch artist Gerard de Lairesse (1641 – 1711) from ‘Anatomia Humani Corporis’ (1685).
© University of Strathclyde, Anderson Collection

 

Miliochka