Être mère. Ces derniers temps je trouve qu’autour de moi – et chez moi aussi – cela rime souvent avec « épuisement ».
C’est un fait. (Dont on a déjà parlé beaucoup aux VI et d’ailleurs également sur mon blog)
On aime nos enfants, on les a voulu, on a à peu près décidé quand les avoir grâce à la contraception, bref, s’ils sont dans nos vies c’est plus que jamais par choix et envie, en règle générale.

Pourtant, j’ai l’impression qu’il n’a jamais été aussi difficile d’être mère.
L’obligation de travailler pour subsister, le besoin pour son épanouissement personnel… mais aussi l’éloignement familial.
Aujourd’hui rares sont ceux et celles qui restent dans la même ville que leurs parents. Les grands-parents n’hésitent pas non plus à changer de ville. Ils sont parfois encore actifs à l’heure où leurs enfants deviennent parents… et auraient bien besoin d’eux.

Nos sociétés ont changé. Pour notre plus grande liberté à nous les femmes – il y a encore beaucoup beaucoup de chemin à parcourir pour le droit des femmes, surtout en ces temps de crise qui nous malmènent – mais aussi pour notre plus grande… fatigue. Les mères épuisées : un fait de société ? Pourquoi pas.
Un article de Figaro Santé envoyé par ma sœur m’a mis la puce à l’oreille. L’article commence par le témoignage d’une maman :

Eva, 39 ans et maman depuis quatre mois, est une privilégiée. Son bébé s’adapte bien à la crèche, son compagnon fait sa part au quotidien, elle reçoit chaque mercredi l’aide de son père, jeune retraité de 62 ans. Il vient s’occuper de sa petite-fille, la promène, la change… Une perle de grand-père !

Une perle que beaucoup de parents aimeraient avoir. Comme le stipule l’article, cela peut sembler banal comme organisation mais cette aide tend à se raréfier.

Comme le prouve une étude menée par une équipe de « psychologues Rose-Angélique Belot et Delphine Vennat – entre autres – et dirigée par Denis Mellier, professeur de psychologie clinique et psychopathologie à l’université de Franche-Comté ».

Voici ce qu’ils ont découvert :

« Première découverte: autour des 6 à 9 mois de l’enfant, des anxiétés concernant leur nouveau-né perdurent chez certaines mères. Elles risquent alors de se diffuser sur l’enfant, qui montre lui-même des signes de retrait, et des difficultés apparaissent dans ces couples qui allaient bien jusque-là. «Ces tensions, nous les avons observées chez les jeunes parents qui se vivent comme “isolés”, commente Denis Mellier. Un isolement qui n’a rien à voir avec leur niveau économique et social ou leur lieu d’habitation, mais avec l’éloignement (physique et/ou psychique) de leurs propres parents et de la famille élargie.» »

Tout est dit non ?
Faute d’avoir nos parents près de nous, on endosse TOUT. Boulot, maison, éducation. Sans sas de respiration.
Et l’article de rajouter :

(…) le «temps du nourrisson» qui permettait à la jeune mère de se reposer pendant quelques semaines sur d’autres femmes, et au couple de respirer, n’existe plus, confirmant une sorte de «surlignage de l’individualisme».

Et quand bien même les grands-parents sont disponibles, des disparités si grandes de modèle éducatif entre les deux générations peuvent diviser parents et grands-parents. Je suis moi-même dans ce cas. On essaie de respecter l’enfant dans notre mode d’éducation. De lui laisser sa place. Mais les grands-parents, de part et d’autres, ne l’entendent pas de cette oreille. Contradiction totale de nos choix devant les enfants, ancienne école ou alors carrément roue-libre – tu veux une 4e glace mon chou, mais bien sûr, mamie va t’en donner une, tu veux des bonbons avec ? – le relai ne peut se faire… Si ce n’est au détriment de notre parentalité et surtout du bien-être de l’enfant.

«La solitude de leurs enfants ne tient pas seulement au fait que ces baby-boomeurs vivent dans d’autres régions ou n’ont pas envie d’endosser le rôle de nounous, confirme Nathalie Isoré, directrice de l’accueil des familles à l’École des parents et des éducateurs, à Paris. L’éloignement peut aussi venir d’une différence de conception dans l’éducation des petits. Lorsque les grands-parents, trop rigides, assènent à leurs enfants des “tu devrais faire comme ci ou comme ça”, une certaine distance s’installe.» Cette «nouvelle» solitude des jeunes pères et mères se vit donc aussi en termes de «comment je pense».

Voilà.
Je pourrais en parler des heures de ce sujet. Des milliards d’heures.
Alors bien sûr, je ne dis pas que cela n’a pas été dur pour nos mères (pour nos pères, sans doute moins à mon sens). Mais il y avait généralement un lien familial plus présent. C’était naturel. Même le lien social est moins facile. A l’époque on laissait notre enfant à la voisine, et vice-versa. Qui le ferait aujourd’hui ?
Aujourd’hui on est plus dans le chacun pour soi. Le temps disponible se fait rare, d’autant plus pour créer du lien social.

Un vaste sujet que je survole de loin, de très loin, et qui mériterait une approche sociologique.
Et vous, qu’en pensez-vous ?

Kiki the mum