Mère au foyer. Un travail qui n’est pas fait pour moi (oui pour moi c’est un travail, au même titre que ce que l’on fait au sein d’une entreprise par exemple). Je le sais depuis que je suis toute petite. Ma mère était mère au foyer et je l’ai vu tant de fois en souffrir parce qu’il était en partie subi mais surtout parce qu’elle n’avait pas de vie sociale riche à côté – ce qui est, je pense, un élément important pour bien vivre le fait de ne pas travailler histoire de compenser le manque de collègues de travail (les rapports de hiérarchie en moins tout de même).

Ce métier-là, mère au foyer, il n’est pas reconnu. Pour la plupart des gens, les femmes au foyer « ne font rien ». Elle regarde Les Feux de l’amour, font du ménage et se la coule douce. Quant aux hommes qui font le choix de rester à la maison… ce sont des planqués ou des bons à rien. Voire « ce n’est pas normal ».

Cela ne m’étonne ainsi pas que ce métier soit en voie de disparition puisqu’il n’est pas reconnu par la société. (Cela tient sans doute également au fait que deux salaires valent mieux qu’un de nos jours.) C’est vrai, élever ses enfants, être disponible au maximum pour eux, élever la France de demain c’est ne rien faire. Préparer tout ce petit monde pour l’école, gérer la manutention de la maison, le budget familial, les achats, les activités des enfants, les devoirs, c’est « rien faire ».

Le problème c’est que même la famille ne le reconnaît pas : les enfants sont habitués à voir leur mère s’occuper de tout depuis toujours (parfois même cela les soule… pour ma part j’ai eu un grand sentiment de soulagement quand ma mère a recommencé à travailler un peu tant elle était contente de reprendre une vie à l’extérieure de la maison). Et le conjoint, puisqu’il ramène le salaire, peut avoir tendance à se délester de pas mal de chose, puisque lui « il travaille » – et est payé en contrepartie. Je sais, c’est stéréotypé, mais je ne pense pas être si loin que ça de la vérité en règle générale, si je me fie aux femmes de mon entourage qui, elles, travaillent déjà à l’extérieur (j’en oublierais presque que je travaille aussi en auto-entreprise à la maison) et s’occupent en plus de presque tout le reste (enfin, elles ont au moins l’argument de leur travail hors de la maison pour exiger que leur homme mette davantage la main à la pâte pour les tâches ménagères… La double peine : les femmes en auto-entreprise depuis chez elle…).

D’après un article du Monde, une femme au foyer c’est :

« … selon la définition de l’Insee, une femme de 20 à 59 ans, non étudiante, vivant en couple et inactive. Les femmes vivant seules sont exclues du champ. »

D’après l’étude de l’Insee dont il parle, par rapport à il y a 20 ans, arrêter de travailler pour élever ses enfants est moins un choix qu’une conséquence de l’arrêt d’un contrat de travail. Surprenant ?

« En 1991, 59 % des femmes au foyer avançaient des « raisons personnelles » à leur choix d’avoir arrêté de travailler pour rester à la maison. Elles ne sont plus que 21 % en 2011 et « la raison majoritaire est devenue la fin d’un CDD », révèle une étude de l’Insee publiée vendredi. »

Donc, les femmes au foyer choisiraient de moins en moins de s’arrêter de travailler. Quand c’est un choix, ce n’est pas pour autant facile. Alors quand c’est subi, je n’ose imaginer… Oui c’est bien de pouvoir davantage s’occuper de ses enfants. Mais qui devient-on quand on a eu un travail, que l’on avait une forme de reconnaissance – une forme car une étude révèle l’ambiance délétère qui règne dans les entreprises depuis le début de la crise et son augmentation du taux de chômage se traduisant par une augmentation de l’absentéisme – lorsque l’on retourne dans l’anonymat du foyer ? Une réadaptation difficile à vivre, à moins d’avoir une vie sociale riche comme je le disais. Et à mon sens, cela est un cercle vicieux : moins on travaille, moins on a confiance en soi, moins on a le courage de retourner sur le marché de l’emploi (79 % des femmes au foyer ont déjà exercé une activité professionnelle en 2011 contre 76 % en 1991 et 60 % des femmes au foyer ont cessé depuis 3 ans ou plus)… A fortiori quand on sait que les emplois précaires touchent essentiellement les femmes…

Mais qui sont ces femmes au foyer ?
– Ce sont les femmes les moins diplômées même si elles le sont plus qu’il y a 20 ans… (19 % des femmes au foyer ont un diplôme du supérieur).
– Celles qui n’ont jamais travaillées et qui sont au foyer sont généralement mères de famille nombreuse, moins diplômées et souvent immigrées.

Et l’étude révèle, je vous le donne en mille :

« La situation de femme au foyer est aujourd’hui plus concentrée sur les âges où les enfants sont jeunes. »

Normal. Et je suis sûre que cela va augmenter. Qui a envie de donner les 3/4 de son salaire à la nounou, de ne voir ses enfants que deux heures par jour et de courir partout tout le temps ? (Attention, la mère au foyer court beaucoup aussi avec un timing souvent digne d’un ministre, le chauffeur en moins et le stress en plus comme on en avait parlé dans les Vendredis Intellos.) Le calcul est bien souvent vite fait. Je suis sûre que le taux de femme au foyer augmente avec le nombre d’enfants et qu’il baisse après le début de la scolarisation. Enfin théoriquement…

Dommage que cet article ne parle pas des pères au foyer. D’ailleurs on devrait plutôt parler de parent au foyer. Même, trouver un autre mot que « foyer ». Le foyer, ça me fait penser à la bonne ménagère de 50 ans dans les pubs américaines pour réfrigérateurs. Un parent au foyer ne fait pas que le ménage, à manger et des lessives. ll peut lire, sortir ses enfants au musée, et même faire chauffer ses neurones. Comme pour les Vendredis Intellos, si tu vois ce que je veux dire. Je dis ça je dis rien.

Kiki the mum