Le BEH (Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire) a publié un numéro spécial (disponible ici en pdf) sur la consommation d’alcool en France, qui a été beaucoup relayé par les médias. En particulier, la question de la consommation des collégiens et des lycéens est assez sensible, et les résultats des dernières statistiques ne sont pas très rassurantes…

L’article, écrit par S.Spilka de l’Observatoire Français des Drogues et Toxicomanies, et ses collaborateurs, est une mine d’information. On y apprend, âge par âge, ou plutôt niveau par niveau, de la 6° à la terminale, les comportements et habitudes des enfants (Oui, ça ne fait pas de mal de le redire, un gamin de terminale, qui a près de 18 ans, c’est ENCORE un gamin, à protéger en tant que tel). Les auteurs tirent ces statistiques de deux très larges études européennes, et se félicite de ce que

« Pour la première fois, l’étude des usages d’alcool repose sur des échantillons représentatifs de l’ensemble des collégiens et des lycéens, et non plus uniquement de quelques tranches d’âge comme c’était le cas dans les enquêtes précédentes. »

Plusieurs résultats sont assez notables dans cet article.

Même si on le savait déjà, l’alcool est avant tout découvert en famille, et ce, avant la sixième la plupart  du temps. Et plus on avance dans l’âge, plus la dose d’alcool est importante, et plus l’alcool consommé est fort.

Les garçons sont plus concernés que les filles par l’alcool. Jusqu’à la seconde, les enfants issus de classes aisées ont tendance à plus consommer. Mais pas en 1ère et en terminale, où ces différences sont gommées.

La composition de la famille (monoparentale, recomposée, ou nucléaire) n’a aucune incidence, mais on trouve une corrélation entre « arriver en retard régulièrement au lycée » et la consommation d’alcool…

Et on a l’info qui a été reprise partout : en terminale, un lycéen sur quatre consomme régulièrement de l’alcool, et un sur quatre est ivre au moins une fois par mois. Il ne sont qu’un sur cinq à consommer moins d’une fois par mois de l’alcool.

Ceci est plutôt bien résumé sur le graphique :

stat alcool

En tant que prof de lycée, je vérifie ce constat régulièrement : il est rare que les lycéens de mon établissement n’ait pas au moins une soirée par mois où il sera question de boire jusqu’à l’ivresse, et le vomi, et tout et tout. C’est évidemment préoccupant. Mais après tout (oui, je me fais l’avocat du diable) : si ça a toujours été ainsi, y-a-t-il réellement un problème ?

Ce qui me semble embêtant tant dans mon expérience de prof, et cette étude va dans le même sens, c’est que la situation a tendance à empirer.

« L’enquête Espad, par exemple, montre que les usages d’alcool à 16 ans au cours du mois sont restés stables entre 2007 et 2011 (64% versus 67%), mais en progression continue depuis plus de 10 ans »

Bien que je ne sois pas encore concerné en tant que parent par ce problème, ce qui m’interpelle surtout concerne les raisons de cet alcoolisme, qui, par le type d’alcool consommé, me semble de plus en plus violent. Je ne me souviens pas de soirée dont le but était de se bourrer la gueule et vomir au plus vite quand j’étais jeune ! ça existait sans aucun doute, mais à ce point ? L’autre point concerne ce qu’il se passe dans ces soirées où tout le monde roule sous la table… N’est-ce pas dans ces conditions qu’on voit l’émergence de comportements violents, de simples engueulades à des agressions sexuelles ?

Lorsque les médias ont parlé de ces résultats de statistiques, je ne les ai pas entendu parler de cela. Je pense qu’il ne faut pas oublier de se poser la question  pourquoi la consommation abusive d’alcool est dangereuse chez les jeunes. Ça évitera de culpabiliser les parents qui ont fait goûter du cidre à leur enfant pour son dixième anniversaire.

 

Voilà donc une étude très facile à lire (elle se trouve page 9 du document en lien plus haut. Passez la partie « méthodologie », sauf si vous aimez ça), à mettre entre toutes les mains, des parents, des pros de l’adolescence, et pourquoi pas, qui pourrait servir de prétexte à des discussions avec les ados sur ce sujet qui ne sera jamais très simple à aborder…

Mr Pourquoi