En ce moment, on entend beaucoup parler de la réforme du rythme scolaire et il est vrai, les questions qu’elle sous-tend sont essentielles et primordiales pour nos enfants. Mais on entend un peu moins parler d’une autre réforme déjà officialisée par une circulaire qui revient sur la scolarisation à 2 ans. 

Il se trouve que j’ai été amenée à me prononcer sur cette question à titre professionnel et forcément un peu personnel. Il se trouve que sur le principe, je ne suis pas trop favorable à une scolarisation précoce. Voir ma fille grandir me conforte dans cette idée, quand je la vois s’épanouir quelques demi-journées, à la halte-garderie, je me dis qu’à son âge c’est amplement suffisant. Je me dis aussi que l’encadrement y est totalement adapté à son âge. Elle y trouve de nombreux adultes, extrêmement bienveillants, non stressés ou pressurisés par un programme d’apprentissage, à 2 ans cela me semble essentiel.

Mais pour se prononcer sur la question, encore faut-il savoir de qui l’on parle et dans quelles conditions seraient accueillis ces enfants. 

Voyons plutôt ce que nous dit le Bulletin Officiel, sur les modalités. 

« Les projets d’accueil et de scolarisation d’enfants de moins de trois ans présentent des formes variées répondant aux besoins et aux ressources locales :

– un accueil et une scolarisation dans une classe de l’école maternelle, spécifique et adaptée aux besoins des jeunes enfants, dont le projet doit être explicitement accepté par la municipalité en raison des contraintes qu’il porte (présence régulière d’une ATSEM, aménagement de l’espace, matériel et jeux adaptés au jeune âge des enfants, rythmes spécifiques, etc.)« 

Il s’agit donc d’un accueil conditionné. Les locaux, et le personnel doivent permettre d’accueillir des enfants aussi jeunes. Mais quand on nous parle de matériel adapté, je m’interroge tout de même. Je ne travaille pas en crèche et minicap n’y va pas, mais j’ai tout de même l’impression que le matériel à l’école (en particulier de motricité) n’est pas véritablement adapté pour des enfants de 2 ans. Alors quoi ? Un budget serait alloué aux écoles accueillants d’aussi jeunes enfants ? 

« – un accueil et une scolarisation des enfants de moins de trois ans dans des classes de l’école maternelle comportant un ou plusieurs autres niveaux. Cette solution peut être efficace si elle correspond à un projet de l’ensemble de l’école maternelle. Elle présente l’avantage de la stimulation apportée par les pairs, mais constitue un cadre moins favorable à une prise en compte des besoins des jeunes enfants. Il est d’autant plus important de veiller aux conditions de scolarisation des plus jeunes enfants pour leur garantir des conditions de développement propices à leur âge« 

Sur la question du niveau de classe des élèves, le BO semble clair, il s’agit davantage d’intégrer les enfants dans des classes d’autres niveaux que de créer des classes de tout petits (TPS) pures. Sur ce point, on peut comprendre cette position car il serait franchement difficile pour un enseignant de diriger une classe de tout petits de 2 ans sans recevoir une formation spécifique et sans des aides matérielles et humaines conséquentes. Mais il n’en reste pas moins, comme le souligne le BO, que la gestion de groupe d’élèves d’âges totalement différents (on peut imaginer des classes de grands avec quelques tout petits) peut amener à négliger les besoins des plus jeunes. Cela demandera, de toutes façons, une grande gymnastique pour l’enseignante.

« – un accueil en milieu mixte, associant services de petite enfance et école, permet d’offrir du temps scolaire dans des dispositifs conçus localement. Ce projet, co-élaboré par l’éducation nationale et les collectivités territoriales, doit garantir la complémentarité des ressources apportées par chaque partenaire dans une cohérence éducative au service du parcours de l’élève. » 

Le tout se ferait donc en partenariat avec les services de la petite enfance. Je sais que les structures d’accueil sont déjà souvent en contact avec les écoles. Il est très fréquent, par exemple, de voir des écoles accueillir en juin, pour une visite, les futurs élèves avec le personnel de crèches. On peut donc aisément imaginer des partenariats se tisser. 

Les enfants concernés seraient en priorité des enfants issus de famille non francophones et scolarisés dans des zones d’éducation prioritaires. Il est vrai que lorsque l’on voit les difficultés rencontrées par certains élèves, en langage, dès la maternelle, on pourrait considérer cette réforme comme bénéfique.

Finalement, j’aurais envie de dire « pourquoi pas ?! » Mais je me demande tout de même pourquoi c’est ENCORE à l’école de pallier les difficultés. Il m’aurait semblé plus judicieux de développer crèches et halte-garderies pour permettre, notamment à certains enfants de se confronter au français, donc à une autre langue que leur langue maternelle, et à se confronter à la collectivité. Ce qui semble manquer à beaucoup d’entre eux à leur entrée en Petite Section de maternelle. 

Une volonté pieuse, si je puis dire mais j’ai juste un peu peur qu’on se retrouve à nouveau dans un fatras de dysfonctionnements, au préjudice des enfants et des enseignants. A voir par la suite, comment tout se passe sur le terrain !

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