La question de la garde d’enfants est évidemment un sujet essentiel lorsqu’on devient parent. On a rapidement tendance à oublier tous les enjeux qui se trouvent derrière cette question : les enjeux égalitaires, économiques, sociétales, éducatifs et émotionnels.
Dans l’article Qui va garder les enfants ? paru dans Sciences humaines, Xavier Molénat nous explique que depuis une dizaine d’années, l’évolution des mentalités concernant la place de l’homme et de la femme au sein de la cellule familiale semble évoluer. « Ainsi, alors qu’en 2000, 47 % des Français estimaient que, s’il fallait qu’un des deux parents s’arrête de travailler pour s’occuper des enfants, c’était la mère qui devait le faire, ils n’étaient plus que 37 % à en être convaincus en 2006. » Cependant, il nuance cette évolution des mentalités en rappelant que dans les faits ce sont surtout les mères qui gardent les enfants. Ainsi 95 % des bénéficiaires des allocations pour congé parental restent des femmes.
Ce qui pourrait faire évoluer cette situation ? Le facteur économique, car selon l’auteur, le système français tel qu’il existe, représente un coût non négligeable. De plus en plus de femmes s’arrêtent de travailler à la naissance du deuxième enfant, bénéficiant d’allocations « généreuses ». Or il se trouve que cela concerne davantage les femmes peu diplômées, aux faibles revenus. Celles pour qui le retrait de la vie active représentera un coût moindre. En effet, seuls 10% des petits français sont accueillis dans des structures collectives entre 0 et 3 ans, chiffre que je trouve, pour ma part, effarant … La garde par une assistante maternelle représente donc un coût élevé pour les familles aux revenus modestes. Or ce retrait de la vie active a des conséquences sur la vie de ces femmes qui se retrouvent parfois dans des situations précaires, dans un contexte où le chômage et le divorce gagnent du terrain. Or cette précarité représente un coût caché pour la société.
Mais dans ce cas, quel modèle adopter ? Xavier Molénat met en avant le système des pays nordiques où est combiné accueil pour tous les enfants et congé parental long (16 mois à partager entre père et mère). Ces deux ingrédients semblent être la recette de l’équilibre concernant la question de la garde d’enfant.
« Un dispositif qui assure, outre une plus grande participation des pères aux tâches parentales, un taux d’activité féminine supérieur de dix points à la France, et un recours nettement moins fréquent au temps partiel. »
Ce n’est pas la première fois que l’exemple des pays nordiques est mis en avant comme modèle mais il ne faut pas oublier que ce modèle a un coût. L’auteur ne l’oublie pas mais ce coût représenterait, selon lui, un investissement pour l’avenir.
« Mais là encore, G. Esping-Andersen insiste sur le fait qu’il faut avoir une vision dynamique de ce qui est un véritable investissement. Chiffres à l’appui, il montre même que la création de places de crèches pourrait, à travers les cotisations sociales tirées des revenus supplémentaires des femmes que ces créations engendrent, se révéler profitable pour les finances publiques. »
Par ailleurs, les bénéfices pour les enfants seraient énormes. Puisque la garde collective systématique devrait permettre de favoriser l’égalité des chances en minimisant l’impact du capital culturel.
Ce qui me semble très intéressant dans cet article c’est cette idée d’investissement sur le long terme. L’auteur tente d’avoir une vision plus large du problème et d’observer la dynamique globale. Ainsi la question des coûts ne peut être analysée uniquement en terme de coûts directs liées à la création de crèches, par exemple. Il faut aller au delà et voir si ces créations ne permettraient pas, par la suite, d’économiser sur d’autres pans des dépenses collectives. De même, proposer des allocations de congé parental au niveau actuel (rappelons que dans les pays nordiques, le congé parental est financé à 80 % du salaire, avec plafond), engendre des décisions de retraits de la vie active, bien souvent motivées par des raisons purement financières et liées au niveau de diplôme des mères. Engendrant ainsi des inégalités. Il serait donc nécessaire de revoir ce système sur le long terme, en repensant, peut-être, le montant de ces allocations.
Xavier Molénat dit de la question de la garde : « Elle pourrait être le point de départ d’une refonte des systèmes de protection sociale dans une perspective dynamique qui, selon le politiste Bruno Palier, « pense les problèmes sociaux en termes de trajectoires de vie : quels sont les investissements nécessaires aujourd’hui pour éviter d’avoir à indemniser demain ?
En somme, penser notre système de garde de façon plus intelligente pour trouver un équilibre acceptable.
A titre personnel, j’ai trouvé l’équilibre très difficile à trouver puisque j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps de ne pas avoir pu, financièrement, prendre un congé parental pour garder ma fille. J’ai aussi éprouvé une certaine rage irrationnelle envers la société qui m’imposait plus ou moins l’idée selon laquelle en tant que jeune femme moderne, il était normal que je reprenne le travail au plus vite, que le contraire aurait même été malsain. Cette banalisation de la situation m’a rendue malade et la frustration que j’ai éprouvée m’a fait du mal. Tout cela pour dire, qu’au delà des questions économiques et égalitaires, il y a une question de choix. Un choix de vie à faire, un choix d’éducation et un choix personnel qui est malheureusement bien souvent tributaire du système qui nous entoure et débouche trop fréquemment sur un non-choix.
Merci pour cet article ! Effectivement la question de la garde est un vrai casse-tête. Je trouve ça culpabilisant quelle que soit la solution trouvée : culpabilité de rester à la maison / de partir travailler, de partir tôt du travail / d’arriver tard à la maison, de gagner moins d’argent / de privilégier sa carrière à sa famille…
Autant de point dont il faut parler sérieusement avec son conjoint, avec beaucoup d’honnêteté intellectuelle. Et la question du retour au travail après le congé parental est aussi importante : la difficulté de trouver une nounou ou une place en crèche est un problème…
Nous avons beaucoup hésité, et hésitons toujours, à avoir recours à une nounou au lieu de la crèche privée que nous avons actuellement. Le soucis de la qualité du service, sans parler de la pénurie de nounou, nous fait pour l’instant préférer la crèche : comment une personne seule, chez elle ou chez nous, peut organiser autant d’activités que la crèche ?
Sans parler du fait que les nounous de mes amies sont souvent d’origine étrangère et ne parlent pas bien français. Alors d’un côté ça permet une ouverture à une autre culture, mais à un âge où on apprend à parler je m’interroge aussi sur l’impact de la langue de la nounou sur l’apprentissage de la langue… Un thème que nous pourrions traiter dans les VI, peut-être que d’autres neuroneuses peuvent partager leur expérience ?
Oui bien sûr, on peut aborder ce thème… on y retrouvera probablement de près ou de loin les problématiques du multilinguisme. J’ai aussi dans l’idée que la situation aura des conséquences bien différentes selon comment elle est vécue par les parents: entre une jeune fille au pair que l’on choisit pour l’ouverture culturelle qu’elle représente et une nounou avec qui on aurait eu un bon contact mais dont on s’inquiéterait des conséquences d’une syntaxe incertaine sur l’apprentissage du langage par nos enfants… on voit bien que la différence tient plus dans le projet éducatif qu’on y met que dans le niveau de langue des éducateurs…
Très intéressant cette approche économique de la garde et du congé parental. J’avoues qu’à chaque fois que je lis un article qui proposerait un congé parental plus court mais mieux payé, je suis super favorable. Mais comme toi, je n’en ai pas pris, alors peut-être que les parents qui prennent les trois ans ne sont pas du tout d’accord ! En l’état actuel des modes de gardes, en chercher un quand ton enfant a 20 mois, c’est clair que ça va être encore plus difficile que quand il en a 4 ou 5…
Je trouve ton article très intéressant et ta conclusion me parle beaucoup. Je vis assez mal aussi cette « idée selon laquelle en tant que jeune femme moderne, il était normal que je reprenne le travail au plus vite, que le contraire aurait même été malsain ». J’ai pu faire le choix financièrement de garder mon enfant et je ressens ce jugement en permanence. C’est sûrement un truc perso pas très bien géré mais comme je dis très bien Guislaine, quelque soit le choix que l’on fait, on culpabilise. C’est quand même que quelque chose doit un peu dysfonctionner dans le système pour que l’on ne se sente pas bien quoique l’on choisisse, non ?…
Effectivement, faire un vrai choix de couple, dont les 2 parents sont convaincu aide énormément à vivre sereinement.
C’est ce qui se passe chez nous, où j’ai un vrai statut pour mon compagnon. Mon travail c’est de garder et de s’occuper de notre enfant, parce que, même si l’amour tient une grande place dans ce choix de rester à la maison et de l’élever, ça reste quand même une vraie activité, appelée, quand elle est effectuée par une autre « assistante maternelle ».
La société a bien du mal à voir les choses de cette manière je trouve.
J’aimerai que les mères (et les pères! ^^) puissent réellement choisir de prendre un congé parental ou non, sans jugement de la société ou impératif financier… Oui je sais, je suis une bisounours par moment… ;) XD
Merci beaucoup de ta contribution!!! Le congé parental est un vaste sujet et j’espère bien nous trouver un de ces quatre un Guest pour répondre à nos questions à ce propos… On cite souvent le modèle suédois, alléchant vu de l’extérieur, mais dont au final, peu d’entre nous (moi la première!) savent à quelle réalité il renvoie (je suis d’ailleurs preneuse de témoignage de parent ayant vécu en Suède et en mesure de nous en raconter un peu plus!!!).
Le congé parental soulève de de nombreuses questions: questions de couple, d’égalité homme-femme à la maison et au travail, de représentation des rôles de la mère et du père, mais aussi de liberté individuelle ainsi que des problématiques sociétales purement économiques… Je pense que cet imbroglio est aussi la cause de nos difficultés à faire émerger un modèle satisfaisant car les différents points se mettent rapidement en tension les uns avec les autres…sans parler des différentes échelles (individuelles/familiales/sociétales/idéologiques) que ce sujet demande de prendre en considération…
J’ai eu la chance de pouvoir prendre 7 mois en tout. Comme toi, au bout de 7 mois la pression était trop forte (à grands coups de « si ton mari se barre tu te trouveras fort dépourvue! Merci, Mman) et je suis repartie travailler, assez en colère contre la norme / les contraintes économiques / moi-même de n’avoir pas réussi à en faire abstraction et de ne pas faire ce qui dans mes tripes me semblait le mieux pour mon fils.
Ceci dit j’ai pu reprendre à mi-temps, et maintenant je trouve que c’est un très bon équilibre. Je suis bien consciente de ma chance, beaucoup ne peuvent pas se permettre ce choix. D’autant que pour moi la crèche coûte environ 2/3 de mon salaire donc financièrement ce n’est pas interessant.
Bref, pas simple!
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