La première partie  : devenir-parents-efficaces-au-quotidien avec nos enfants et nos ados – partie 1 vous proposait de découvrir l’écoute active qui va nous mener, avec deux autres techniques à la fois simples et  auxquelles nous sommes hélas trop peu habitués, à une méthode pleine de sens et de résultats encourageants et enthousiasmants : l’ensemble est appelé méthode sans perdant, rendue célèbre dans le monde par Thomas Gordon qui l’a enseigné à de nombreux parents avant d’écrire ce livre qui l’approfondit par les expériences des familles pendant des années (Parents efficaces au quotidien – La méthode Gordon expérimentée et vécue, par le docteur Thomas Gordon)… Aujourd’hui je vous propose de nous pencher sur les bénéfices de la technique d’écoute active que nous avons abordé dans la première partie et de découvrir ce qui Thomas Gordon nomme le message « je » , qui est facile à retenir et à mettre en place.

Ce qui change dans la famille quand les parents savent écouter

Si un enfant dit « je te déteste », il utilise un code pour exprimer sa colère ou sa frustration ou sa déception. Une fois qu’on aura utilisé l’écoute active pour répondre à ces sentiments plutôt qu’à ce code, l’enfant se sent compris et peut le plus souvent passer à autre chose et n’a pas à se sentir honteux.
Aider les enfants à accepter la réalité et les limites :  « tu dois être terriblement déçu… Je suis sûr(e) que d’une manière ou d’une autre, tu t’en sortiras! Dès que tu seras d’attaque, si tu as envie tu pourras venir m’aider à bêcher dans le jardin. »
S’attaquer au vrai problème : l’écoute active favorise le passage du problème apparent au problème fondamental (p106 à 110)

Développer la responsabilité des enfants

Une écoute empathique et attentive transmet à l’enfant plusieurs attitudes d’esprit :

  • Je n’ai pas l’intention de prendre en charge ton problème
  • Mais je vais t’aider à trouver ta solution.
  • J’ai grande confiance en ta capacité de prendre en main ce problème de façon constructive.       
  • Je ne t’aime pas moins parce que tu as des problèmes. Ils font partie de notre vie à tous!

Ces attitudes paraissent exercer une influence puissante sur les enfants et les encouragent à assumer la responsabilité d’affronter leurs propres problèmes au lieu de demeurer dépendants de leurs parents.

Dépasser le quotidien pour leur rappeler ce qu’on souhaite vraiment pour eux :  » Tout ce que je souhaite, c’est que tu soies content(e) pour toi. Peu importe ton classement [ à l’école, au sport, en rangement etc…] Je t’aime de toutes façons. »

Je trouve qu’exprimer ces intentions ou ressentis avec nos propres mots sans rajouter autre chose n’est pas évident, mais c’est important. Ils ressentent nos espoirs et nos exigences comme des devoirs, si nous les rassurons sur l’amour que nous leur portons, quels que soient leurs résultats, ils se mettent à travailler pour eux, et non plus pour nous.

Dépasser le quotidien pour leur rappeler ce qu’on souhaite vraiment pour eux :  » Tout ce que je souhaite, c’est que tu soies content(e) pour toi. Peu importe ton classement [ à l’école, au sport, en rangement etc…] Je t’aime de toutes façons. »

Je trouve qu’exprimer ces intentions ou ressentis avec nos propres mots sans rajouter autre chose n’est pas évident, mais c’est important. Ils ressentent nos espoirs et nos exigences comme des devoirs, si nous les rassurons sur l’amour que nous leur portons, quels que soient leurs résultats, ils se mettent à travailler pour eux, et non plus pour nous.

« Je voudrais être mort » (p119, 120)

Aucun récit n’illustre avec autant d’évidence les effets spectaculaires de l’écoute active que celui-ci, qu’une mère nous a relaté :

«  L’histoire est simple. Je suivais la formation Parents efficaces quand mon fils aîné, alors âgé de huit ans, s’est mis à faire des remarques fréquentes sur sa vie qui était vraiment fichue, qu’il ferait mieux de mourir. Il émettait des jugements désespérés qui m’inquiétaient profondément. En élevant mes enfants, je m’étais fixé un but clair et invariable : qu’ils aient un sentiment positif d’eux-même et qu’ils puissent s’éveiller chaque matin en trouvant qu’il fait bon vivre. Et voilà que mon aîné, mon unique garçon, qui semblait vivre exactement le contraire de ce que j’avais si ardemment souhaité et fait tout mon possible pour qu’il éprouve.

J’avais déjà expérimenté l’écoute active auprès de mes camarades de cours, mais je ne voyais pas que deux et deux font quatre. La solution était sous mes yeux, et je ne la voyais pas.

Quelques semaines plus tard, mon fils est entré, l’air abattu, dans la cuisine où je préparais le dîner, et il a tenu un de ses propos dépressifs. Je n’étais guère experte en écoute active et mes quelques tentatives précédentes avaient sonné bien faux, mais j’ai décidé de faire un nouvel essai. Il venait de dire quelque chose comme : « Sûr que je n’aime pas beaucoup ma vie… » et ça tournoyait dans ma tête pour essayer de trouver une formule qui lui renvoie ça, et tout ce que j’ai trouvé, ç’a été quelque chose qui m’a paru complètement inadapté et dépourvu d’imagination, du genre :  » On dirait que tu te sens déprimé. » Il ne parut pas remarquer mon incompétence et poursuivit par un « Personne ne prend soin de moi« , suivi d’un « Toi et papa faites toujours des choses avec Judith et Rebecca (ses soeurs)… » et ainsi de suite. Je me disais :  » Je n’ai jamais vu d’enfant plus déprimé », je me suis sentie tour à tour coupable, irritée, déçue, mais j’ai continué à dire « Mmm Mmm », « Tu es vraiment très triste à cause de ça » ou « Tu penses que nous les aimons plus que toi ». Tout cela me paraissait laborieux et artificiel et je ne pensais pas que nous ayons une grande chance d’aboutir à l’une de ces « fins heureuses » paradisiaques du bouquin. Il ne montrait aucun de ces indices-d’une-évolution-vers-une-solution dont le livre est rempli. Il continuait simplement à accumuler des situations de plus en plus déprimantes, remontant jusqu’à des événements qu’il avait vécus à l’âge d’environ trois ans !

Au bout de trois quarts d’heure, je lui ai dit que j’aurais bien voulu continuer, mais que le dîner était déjà en retard et que s’il voulait, nous pouvions fixer un moment pour revenir à notre entretien. Il a dit d’accord, qu’il avait terminé, et il a bondi de sa chaise et il est sorti en sifflotant! J’étais abasourdie. Et, enfin! une chose m’a frappée : c’est que jamais je n’avais permis à cet enfant d’avoir une bonne raison pour arranger la situation, sans jamais lui manifester la simple sympathie d’humain à humain qui lui aurait permis d’éliminer ses problèmes en les affrontant !

C’était il y a un an : depuis, aucun signe de dépression n’a reparu. Il y a eu des incidents désagréables ou décourageants. Jamsi plus je n’ai cherché à les justifier par des explications ou à offrir des solutions. Je pratique l’écoute active du mieux que je peux. La vie n’est pas tout entière glorieuse et rose. Tous les problèmes ne sont pas immédiatement résolus. Il y a des jours où tout semble aller de travers. C’est la vie. »

 Nouveaux aperçus pour aider les parents à satisfaire leurs besoins

« Vivre avec un enfant signifie inévitablement que certains comportements vous sembleront parfois inacceptables parce qu’ils contrarient ce que vous voulez faire, qu’ils vous empêchent de vous épanouir ou qu’ils créent en vous un sentiment de frustration ou de vive colère. Beaucoup de parents ne savent pas assez s’affirmer, et leur permissivité encourage leurs enfants à les bousculer sans cesse. D’autres tentent de s’affirmer, mais par des moyens si agressifs que la relation avec leurs enfants en est brisée et qu’ils nuisent à l’estime que les enfants doivent se porter.
Notre approche encourage explicitement les parents à s’affirmer lorsque la conduite de leurs enfants leur crée un problème, mais elle propose à cet effet des techniques précises, nouvelles pour la plupart des parents, et qui les aideront à s’affirmer d’une manière bien plus efficace et constructive. »

La majorité des comportements types des parents confrontés à une conduite jugée inacceptable de leur enfants fait partie de la catégorie des « obstacles à la communication » :

« 1. Ordonner, commander, exiger
Va dans ta chambre.
Arrête de aire tout ce bruit.

2. Menacer, avertir, mettre en garde
Si tu n’arrêtes pas, tu auras la fessée.
Débarrasse le plancher ou je me mets en colère.

3. Moraliser, sermonner
On ne coupe pas la parole à quelqu’un.
Il faut toujours dire merci.

4. Conseiller, donner des solutions
Pourquoi n’irais-tu pas jouer avec tes copains ?
Ne pourrais-tu mettre tes vêtements autre part ?

5. Argumenter, persuader par la logique, faire la leçon
Il n’est pas correct d’utiliser ton couteau comme tu le fais.
Les livres sont faits pour être lus et non pour être jetés.

6. Juger, critiquer, blâmer
Tu n’es pas soigneuse.
Tu es un mauvais garçon.

7. Complimenter, approuver, louanger
Toi qui es si gentil avec tes camarades !
Ce n’est pas ton genre d’être aussi insouciant.

8. Humilier, ridiculiser, étiqueter
Tu es la mouche du coche.
Tu devrais être honteux de ta conduite.

9. Interpréter, psychanalyser, diagnostiquer
Tu es simplement un peu jaloux de ton frère.
Tu veux toujours m’embêter quand je suis fatigué.

10. Rassurer, sympathiser, consoler
Ne t’inquiètes pas pour ce que je ressens.
Le bruit ne me dérange pas vraiment.
Je comprends pourquoi tu tapes sur ton petit frère.
Allez, tout va bien!

11. Enquêter, questionner
Pourquoi as-tu fais une chose pareille?
Es-tu conscient de ce que tu viens de dire?
Pourquoi faut-il que tu fasses hurler la radio?
Qui t’a appris ça?

12. Dévier, blaguer, esquiver
Ne veux-tu pas lire plutôt que de regarder cette niaiserie à la télé?
Regarde comme il fait beau, va jouer dehors.
Je suis si heureuse d’avoir des enfants aussi sages et aussi gentils.
Tu n’as pas peur de te crever les tympans ? »

Ces messages « tu » sur les enfants produisent le plus souvent un ou plusieurs effets suivants :

1. Les enfants résistent quand on leur ordonne de faire quelque chose ou quand on les menace.
2. Les enfants se détournent des parents qui moralisent, sermonnent ou font la leçon.
3. Les messages « tu » font savoir : « Je ne te fais pas confiance pour trouver un moyen de m’aider. »
4. Les messages « tu » refusent à l’enfant la chance qu’ils trouvent d’eux-même un comportement qui tient compte des besoins des parents.
5. Les enfants qui encaissent des blâmes ou des insultes se sentent coupables.
6. Blâmes et insultes réduisent l’estime que l’enfant a de lui-même.
7. Les enfants se sentent rejetés et mal aimés quand ils reçoivent des messages qui les informent qu’ils sont « méchants » , « idiots », « irréfléchis », « insouciants ».
8. Les messages « tu » suscitent des réponses-boomerangs qui humilient le parent : « Tu es toujours fatigué », « Toi aussi tu laisses traîner tes affaires », « Tu es un gros grognon », « Tu n’es jamais contente »…

 

« Les messages qui font comprendre à l’enfant les conséquences que son comportement entraîne pour votre vie ont beaucoup moins de chances de produire des effets semblables :
– Je ne peux pas faire la sieste avec tout ce bruit dans la maison.
– Ca me démoralise complètement de retrouver dans un tel état la cuisine que je viens de nettoyer.
– A cause du bruit que vous faites, je n’entends plus rien au téléphone et ça me contrarie. »

L’utilisation du « je » change beaucoup de chose : le code est clair !

Se poser la question : « Quels sont mes sentiments réels? »
En employant le message »je » , on est obligé de se mettre à l’écoute de ses sentiments.
Ce qui peut aider  :
1. Faire une liste
2. Inscrire dans un tableau :

  • Une dizaine de comportements de votre enfant qui vous sont généralement inacceptables (1e colonne)
  • chercher en quoi ils entravent pour vous un besoin ou un désir.
  • dans une seconde colonne, à la suite de chacun des comportements, écrire les mots « j’ai peur »
  • dans la 3e colonne écrire les mots qui complètent de façon appropriée la peur suscitée…

3. Chercher le sentiment, l’impression de base (pas besoin de trouver des mots élégants ou le plus précis possible).

Définir ce qui nous rend soucieux ou anxieux ou fâché n’est pas si facile, mais le mettre en mots permet d’ôter à l’enfant le sentiments de culpabilité flou et anxiogène qu’il ressent la plupart du temps lorsque nous disons juste que nous sommes fâchés ou en colère…Thomas Gordon nomme cela le « sentiment premier » : celui qui entraîne nos réactions. En trouvant le sentiment premier, puis en le communiquant, le parent réalise dans la plupart des cas que son propos est en fait d’amener son enfant à changer de conduite : la colère n’a souvent rien à voir…

Emettre un message « je » complet et clair est important :
1.Décrire le comportement inacceptable, 
2. puis exprimer le sentiment premier vécu, 
3. et enfin expliquer l’effet concret et tangible que cela provoque en nous.

En expliquant l’effet concret (le pourquoi) provoqué par leur comportement que nous jugeons inacceptable, nous leur donnons une bonne raison pour renoncer à un comportement qui leur convient. « Ne pas communiquer cela à l’enfant [le pourquoi], c’est le laisser sans raison de changer. »

Cela peut amener à des solutions qui se dégagent presque d’elles-même… (voir p137, 138)

Quand les enfants ignorent notre message « je » : 

Si « un message « je » est simplement le meilleur moyen (…) pour informer quelqu’un que sa conduite vous fait problème. Il réduit aussi les risques de provoquer chez l’autre personne un sentiment de culpabilité, d’humiliation et de rancune. Mais [ça ne] garantit jamais que l’autre personne va immédiatement, spontanément, modifier son comportement en considération de vos besoins.
Si vous avez communiqué votre sentiment premier et l’effet tangible engendré, il existe d’autres facteurs qui ont une influence sur le succès ou l’échec de votre message :
« Ecoutez-vous quand c’est votre enfant qui a des problèmes? » « Le désir d’aide doit être réciproque. Il ne peut être à sens unique, en tous cas pas pour longtemps. Si vous écoutez bien vos enfants quand ils vivent des problèmes , vous allez augmenter les chances de les voir répondre de façon constructive à vos messages quand c’est vous qui avez le problème. »
« L’importance de savoir changer de position et passer à l’écoute active » quand c’est nécessaire. Dans ce cas, l’écoute active va aider à réduire les réactions émotives de l’enfant devant notre tentative de satisfaire nos besoins.
« Les messages de solution ne sont pas des messages « je » » .
Exemple : « Quand la table est encombrée de papiers, je ne peux pas mettre le couvert pour le dîner, et je n’ai pas envie de la débarrasser moi-même. » plutôt que « je veux que vous rentriez débarrasser la table » qui est une solution et un ordre… et sera généralement inefficace.
« Le recours au pouvoir et à l’autorité » après un message « je » est totalement inefficace à long terme : cela « équivaut à dire à l’enfant : « J’ai un problème et j’aimerais que tu m’aides, mais si tu ne le fais pas, je t’y forcerai! » Ce n’est pas le genre de message qui fortifie chez l’enfant le désir de prendre en considération les besoins de ses parents, n’est-ce pas? »

Bienfaits des messages « je » pour les parents et la vie familiale

Un père rappelle à sa femme le succès d’un message « je » : « Un soir, tu nous as annoncé que le dîner était prêt, et personne n’est venu. Tu as alors fait un très bon message « je » : « Je suis frustrée, j’ai passé beaucoup de temps à préparer un bon dîner et ça m’embête que tout soit en train de refroidir. » C’a été dit si spontanément que ça devait marcher. J’ai observé les enfants : ils ont senti le bien-fondé du message et ils sont arrivés. J’envie cette capacité que tu as d’exprimer des messages « je » aussi bien construits. La plupart du temps, elle fait ça sans même s’en rendre compte. »

L’écoute active libère les enfants, le message « je » libère les parents. 
Les messages « je » ont aussi un effet de libérateur, en plus d’être le plus souvent efficaces. « Ils aident les parents à exprimer leurs sentiments au lieu de les garder enfermés en eux. » 

Nouvelles applications des messages « je » :

Le message « je » aux tout-petits et aux nourrissons a été l’objet d’un article par Mille Bulles pour les VI

Le message « je » d’appréciation peut servir à mettre en relief ce que l’on ressent de positif et pourquoi (toujours les 3 parties) . Un exemple :

« Tu t’habilles toute seule maintenant, j’aime bien car ça nous laisse plus de temps pour bavarder et nous amuser ensemble. » Et [Caroline] rayonne.

Le plus dur alors est de ne pas émettre de jugement ni évaluation : les compliments peuvent être perçus comme un contrôle, comme une tentative de « renforcer » leur « bon » comportement.(pour mieux comprendre les nuances, lire pages 171 à 178)

Le message « je » de prévention : on prévient à l’avance.
« Ces messages d’affirmation n’obtiennent naturellement pas toujours le résultat exactement escompté par les parents mais il est infiniement préférable que vos enfants sachent à l’avance ce que vous avez en tête, plutôt que d’attendre que, dans l’ignorance de vos besoins, ils se conduisent de façon inacceptable. Un message « je veux » émis à temps vous évitera dix confrontations. »

Comment les messages « je » aident à la résolution des problèmes
« Quand un message « je » échoue à produire un changement immédiat dans un comportement d’enfant, il y a des parents qui abandonnent, déçus, pleins de ressentiment. Ils oublient que les messages « je » ne sont souvent qu’un prélude à la résolution d’un problème ou d’un conflit. »
« Quand les messages « je » n’ont pas suffi, les parents doivent partir à la recherche d’une solution jusqu’à ce qu’ils en aient trouvé une qui répondra à leurs besoins comme à ceux de leurs enfants. »

Pour conclure cette seconde partie : 
« La plupart des parents comprennent vite qu’en apprenant à mieux écouter, ils ont tout à gagner et rien à perdre. » Les parents sont aussi très réceptifs au message « je » qui est facile à mettre en place. Reste à aborder la méthode sans perdant proprement dite, ce que nous ferons lors de la 3e et dernière partie, les deux premières techniques étant un préalable nécessaire à la troisième pour que l’ensemble soit authentique, bénéfique et efficace !

Maybeegreen