L’adolescence : prononcez ce mot et vous flanquerez la frousse à de nombreux parents.
Sauf à moi.
Les adolescents me passionnent. Il me tarde presque que ma Zouzou ait l’âge de déraison.
Pour moi, c’est un âge passionnant : son enfant s’engage avec force et fracas passion sur le chemin de la vie d’adulte.
J’adore les ados. Ils sont sensibles, réceptifs, en attente des adultes, aussi courageux que fragiles. Avide de connaître la vie !
Et si on les écoute, ils nous font part de réflexions étonnantes sur la vie… Et ça, ça remet les idées en place !

Vous vous dites : « Facile, elle en a pas d’ado. »
Ouais facile.
J’en ai côtoyé quelques uns. De loin.
Mais c’est surtout que je m’en souviens de mon adolescence. Et l’intensité avec laquelle on vit les choses durant cet âge me manquerait presque.
On se tuerait pour une histoire d’amour, on pleure des jours ou des semaines, on trouve nos parents à chier, on a envie de mourir, et le lendemain de faire la fête avec ses copines.

Pourtant, souvent les parents qui ont des ados sont un peu désarçonnés, voir soulés.
Et il y a de quoi : leur enfant n’est plus et laisse place à un nouvel être… en opposition, un peu comme lors du Terribeul Two finalement, les mots durs et la musique forte en plus.

Mais c’est quoi exactement l’adolescence ? Un âge ? Une période ? Et si c’était une invention des temps modernes ?
L’autre jour j’écoutais une émission sur France Inter sur les ados. Pierre-Henri Tavoillot, philosophe, part du principe que l’adolescence est presque une invention des temps modernes.

« Cette crise, pour nous, modernes, est devenue un âge (…) On sort de l’enfance de plus en plus tôt et on rentre dans l’âge adulte de plus en plus tard. Cela dure maintenant près de 15 ans. On concentre sur ces 15 ans ce qui se passait en 3 jours avant. »

On stigmatise cet âge finalement. Comme si nous avions peur qu’ils soient adultes trop vite ? Comme si nous n’étions pas prêts à les voir si grands ?
Un article de Sciences Humaines
affirme justement ce précepte que l’adolescence est un mythe des temps modernes :

« La logique voudrait que l’adolescence ait toujours existé. Pourtant, cet âge charnière de la vie a longtemps été ignoré : on passait directement de l’enfance à l’âge adulte. Une autre croyance la voit comme une fabrication récente d’un xxe siècle plus enclin à prendre en compte les particularités et les difficultés de sa jeunesse. C’est en fait au xixe siècle qu’émerge la notion d’adolescence comme âge spécifique de la vie. Dans une recherche d’histoire culturelle, Agnès Thiercé offre une généalogie de la notion et montre comment les perceptions, d’abord négatives, de l’adolescence ont fortement évolué et sont à l’origine de nos représentations actuelles.

Au xixe siècle, médecins et pédagogues, fortement imprégnés des idées rousseauistes, voient d’abord dans l’adolescence une période particulièrement critique, liée à la puberté. Un âge « bâtard », « gauche », « ingrat » aussi bien physiquement que moralement. Le manque de lucidité, la propension à la rêverie, l’inexpérience sont associés à l’explosion des passions : « L’adolescent est raisonneur, il n’est pas raisonnable »… Le xixe siècle invente, selon l’auteur, l’expression de « crise de l’adolescence ». Les phobies qu’elle suscite sont d’ailleurs à l’image des hantises de l’ordre bourgeois : explosion de la sexualité, peur des « amitiés particulières » chez les garçons, de l’hystérie féminine, des révoltes et des « insubordinations lycéennes ». »

« C’est en fait la Troisième République qui fera de l’adolescence une classe d’âge à part entière. Avec l’instauration des lois scolaires (1881), la scolarité obligatoire s’arrête à 12 ans (ce n’est qu’en 1936 qu’elle est prolongée à 14 ans).

Tout s’explique donc ! « Mais non mon chéri, tu n’es pas en pleine crise d’adolescence, tu es en plein mythe. »

Kiki the mum