Cette semaine, nous avons flashé sur un dossier du numéro de  Courrier international du 5 avril consacré à l’école. (sur internet sur abonnement, à trouver éventuellement en bibliothèque)

L’un des articles intitulé « En France l’enseignement est trop abstrait  » est consacré à notre école vu d’un britannique, John Lichfield, correspondant à Paris du journal The Independent,  qui a scolarisé ses enfants en France.

Extraits :

« Quels sont, selon vous, les points faibles de l’enseignement en France ?
 
John Lichfield : Si I’on fait la comparaison avec l’Angleterre, il y a trop d’abstraction et une obsession pour la théorie, pas suffisamment de créativité dans l’approche.Quand mes enfants étaient petits, j’étais surpris qu’on leur demande toujours d’analyser des phrases plutôt que d’écrire par eux-mêmes quelque chose d’original.« 

Oui en effet, moi aussi , je suis surprise des connaissances académiques que l’on demande à nos enfants d’ingurgiter dès leur plus jeune âge.

Et je me rends compte que c’est encore pire au collège.

Voici un sujet donné à ma fille en 6e :

« Etant donné une vieille boîte en bois que je veux détruire ou jeter au rebut, ai-je le droit de dire que je la tue, que je l’épluche, que je la fais cuire, que je la mange, que je la digère, ou encore que je l’efface, que je la biffe, que je la condamne, l’incarcère, l’exile, la destitue, la vaporise, l’éteins, la scalpe, l’embaume, la fais fondre, lélectrocute, la dégonfle, la soufle ? »
Extrait de  » le professeur Froeppel » de Jean Tardieu, édition L’imaginaire, Gallimard
( Biffer : rayer,barrer / Incarcérer : emprisonner / Exiler : se retirer pour vivre à l’écart/ Destituer : déposséder de sa fonction) Prouver qu’il est possible de répondre aux question posées par le texte de Jean Tardieu.
Pour ceci, vous travaillerez en deux étapes  :
1. Trois boîtes en dessin : dessinez cette boîte décrite par Tardieu, en train de subir trois des actions proposées dans le texte.
Modalité : feuille canson A4, crayon à papier, crayons de couleurs
2. Une boîte en volume : choisissez une de ces représentations, et réalisez-là en trois dimensions.
Modalités : Matériaux et outils libres.

Alors avez-vous trouvé de quelle matière il s’agit ?

Et bien il s’agit d’Art plastique ! Vous vous rappelez, cette respiration de liberté que nous avions étant enfant, où on découvrait , le dessin, les astuces de la perspective, l’ombre et la lumière, l’art des couleurs ?

Et bien c’est devenu ce genre de choses.
Rappelons que l’on s’adresse à des enfants qui ont plus la culture du SMS que celle du livre, et mesurons le fossé qui sépare cet énoncé du fonctionnement mental des enfants d’environ 11 ans.

Quant à mon fils, en CM1, on lui a demandé un exposé sur « Les très riches heures du Duc de Berry » …

Vu du Royaume Uni, tout de même quelques points forts à notre enseignement français :

« Et ses points forts ?
 
Le système permet aux éleves d’être à l’aise pour s’exprimer oralement. Les jeunes Britanniques, eux, s’expriment généralement dans un anglais catastrophique. Les enseignants du primaire sont souvent très motivés, et ils ont un rapport assez chaleureux avec les élèves. Je me souviens du premier jour de mon fils au CP: le premier geste de l’enseignante a été de lui faire une grosse bise. Il était très étonné, et nous aussi, parce qu’il est inimaginable qu’en Angleterre un  teacher fasse la même chose. Ça l’a beaucoup rassuré, dès le début. »

C’est vrai, reconnaissons le, malgré des programmes très chargés, on tombe quand même souvent sur des enseignants formidables, qui aiment réellement les enfants.

C’est  assez variable, il arrive aussi que l’enfant et l’enseignant ne s’entendent pas, et là c’est un an de cauchemare pour toute la famille. Mais là je dirais que c’est un apprentissage de la vie. Personne n’est parfait, chacun à ses défauts, et il faut apprendre à faire avec. Je dois reconnaître qu’à 99% des cas, lorsqu’on donne à l’enseignant quelque clés de compréhension de notre enfant, ça débloque les choses. ( Devrions-nous créer une rubrique VI « comment discuter avec les enseignants de nos enfants ?’ !!)

Quels sont selon vous, les défis du prochain quinquennat en matière d’enseignement?
 
La grande catastrophe du système français survient après le bac : la France investit beaucoup moins d’argent dans les universités que l’Allemagne, la Belgique ou  l’Angleterre. Certes, le système est presque gratuit, mais, finalement, parce que c’est presque gratuit et que presque tout le monde peut entrer à I’université, le niveau dans la plupart des disciplines est assez bas. Après trois ans, on obtient un diplôme avec lequel on ne peut rien faire, il faut poursuivre avec d’autres études. En Angleterre, après trois ans d’université, les jeunes peuvent trouver un travail. Le rythme scolaire doit également être réformé : les journées sont trop longues, et les vacances aussi.

Si on regarde les chiffres publiés dans un numéro hors série d’Alternatives Economiques sur l’école, les investissement dans la formation (tout compris) en % du PIB, sont dans la moyenne des pays de l’OCDE (NB ce sont des chiffres issus du ministère de l’Education Nationale), mais la tendance est à la baisse.

Le plus frappant dans cet article,  c’est la régression en terme de justice  sociale démontrée par les enquêtes PISA successives : notre école a de plus en plus amplifié les inégalités sociales.

Pour ce qui concerne les rythmes scolaires, j’en avais parlé sur mon blog perso en novembre 2010 (voir ici), lors de publications diverses. Cela fait 1,5 ans. Qu’est-ce qui a été fait concrètement ? Quelques expériences pilotes d’études le matin, sport l’après-midi. Pas trop entendu parler dans la campagne présidentielle. Mais un rapport paru en septembre 2011 après une expérimentation sur 1 année scolaire par 120 établissements.(voir sur mon blog perso ici)

L’insuffisance des propositions des candidats, c’est aussi l’avis de notre observateur british :

Avez-vous relevé des propositions intéressantes chez les candidats à la présidentielle?
Ni M. Sarkozy ni M. Hollande ne proposent de vision globale de ce que doivent être les réformes éducatives. Leurs propositions sont trop limitées et spécifiques : des propositions de ministres de l’Education plutôt que de président de la République.

Quel que soit le candidat qui sera élu, notre chère école de la république a besoin de réformes ambitieuses à la mesure des défis de demain .

En attendant, poursuivons le débat ! Et allons  lire l’article de Flo la souricette sur le modèle finlandais, où il y a certainement à prendre et à laisser, mais qui à première vue est beaucoup plus centré sur l’enfant réel.

Phypa