A mon sens, l’un des aspects les plus importants de ce métier est celui de l’écoute. Et dieu sait si les deux sages-femmes que j’ai eu la chance de rencontrer pour mon suivi avaient compris cela !

Demain, j’ai rendez-vous avec l’une d’elle pour l’entretien du 5ème mois. Mon premier-rendez pour cette seconde grossesse.

Ce rendez-vous m’avait été largement profitable lorsque j’attendais ma fille. En effet pour cette première grossesse, je vivais assez mal ce changement identitaire qui faisait que de fille j’allais devoir être mère.
Cet entretien m’a permis de mettre des mots sur ce qui me tourmentait depuis quelques mois. Je me suis rapidement sentie à l’aise avec cette sage-femme et j’ai pu ainsi exprimer pour la première fois mes angoisses alors que je pensais que celles-ci ne pouvaient pas être dites.

Et pour cause : on ne parle jamais de ces états de doutes et d’angoisses pendant la grossesse. Personne ne s’autorise à dire « J’ai peur de ne pas être une bonne mère, et si j’avais fait le mauvais choix, si je ne réussis pas à aimer cet enfant… ».

L’intérêt d’avoir à faire à une professionnelle c’est qu’il n’y a pas d’enjeu dans ce que je vais lui raconter, en revanche avec mes proches, oui.
Et puis, avec cette femme j’ai tout de suite senti que la parole était libérée…Grâce à son écoute, en deux minutes elle réussissait à me faire parler.

C’est ce que raconte Chantal Birman, dans son livre « Au monde, ce qu’accoucher veut dire ». Chantal Birman beaucoup la connaissent, elle est sage-femme à Paris. Co-fondatrice de la coordination nationale des sages-femmes et vice-présidente de l’association nationale des centres d’I.V.G et de contraception. Elle a reçu la légion d’honneur.

Pour Chantal Birman, « Etre sage-femme, c’est donc pénétrer, s’installer dans l’intimité des femmes. De la façon, la plus crue, la plus cruelle, mais aussi d’une façon plus discrète et profonde ».

Cela me fait penser entre la différence des rôles entre la sage-femme qui prépare à la naissance et celle qui assiste la maman pendant l’accouchement.

Effectivement, j’ai trouvé toute l’écoute et toutes les informations dont j’avais besoin pendant ma préparation à la naissance dans un cabinet en libéral. Les sages-femmes de la maternité qui m’ont assisté pour la mise au monde n’ont pas eu du tout le même rapport avec moi. Et cela est bien normal, elles étaient sur un aspect plus technique, médical et sécuritaire. Il n’y avait pas cette discrétion cette profondeur de celles avec qui j’ai passé du temps à préparer cette naissance.

Comme le dit Chantal Birman, être sage-femme c’est « s’installer dans l’intimité des femmes. De la façon la plus crue… ». C’est ainsi que j’ai ressenti les interventions du personnel de la maternité auprès de moi. Mais cela ne m’a pas incommodé. Puisque j’ai l’impression que la grossesse et la maternité sont constituées de ces deux aspects : l’un doux et profond, l’autre plus cru, plus animal. Il va donc de soi que ce métier revêt ces deux abords.

Dans son livre elle illustre ainsi la question de l’écoute par la sage-femme :
«« Bonjour, comment allez vous ? ». En marchant jusqu’au fauteuil, elle me répond. Sa poignée de main, sa voix, sa tonalité, sa démarche, la plus ou moins grande difficulté qu’elle a à s’asseoir dans le fauteuil et surtout les mots qu’elle choisit pour me répondre sont autant d’indications précieuses sur la façon dont je dois orienter la consultation. Entre le « formidablement bien » explosif et le « très mal » suicidaire se développent toutes les nuances de l’état psychologique ».

Effectivement comme la sage-femme ne dispose que peu de temps et d’éléments sur notre état il est important qu’elle puisse se saisir des quelques premiers mots échangés avec la patiente pour orienter la consultation, amener la patiente à libérer la parole.

La mienne pour cela est une championne et j’attends avec impatience mon rendez-vous de demain pour qu’elle use de ses talents sur ma p’tite personne !

**********

(suite)

Ah voilà ! Je sors de mon entretien du 4ème mois : Du bonheur en barre ! Une heure de discussion super intéressante.

Décidemment cette sage-femme a tout compris de son métier, elle trouve toujours les mots justes, les explications adéquates et elle a un sens de l’écoute hors du commun !

Nous avons d’abord évoqué les complications de la grossesse (et en particulier la mienne évidemment !) et j’ai enfin eu les explications que j’attendais.

Alors quand mon gynéco me dit repos, ça veut dire repos allongée (au maximum). Elle dit qu’il ne pense jamais à le préciser, car selon beaucoup de gynécologues une fois qu’une femme est en arrêt de travail, il va de soi, qu’elle reste allongée puisqu’elle n’a plus rien à faire !

Sauf que moi, comme beaucoup je n’avais pas vu les choses de cette manière. Ces dernières semaines je me suis mise au repos : Plus de travail, plus de trajets, plus de ménage, mais je suis beaucoup restée assise pour jouer avec la plume ou…derrière mon ordi, en bonne geekette que je deviens ! Alors voilà, je dois m’obliger à m’allonger davantage, ce qui est bien difficile…C’est vrai que j’en ai parfois rêvé les jours où j’étais débordée et épuisée mais là ce n’est pas le cas.

En dehors de cela nous avons évoqué l’arrivée d’un 2ème enfant : j’ai tout de suite pu exprimer le fait d’être très sereine par rapport à mon futur rôle de maman du têtard (ce qui n’était pas le cas pour ma première grossesse). Il y a seulement un point qui m’inquiète parfois dans cette grossesse. Et dont Chantal Birman parle ainsi :

« Bien souvent se pose pour la mère la question de savoir si elle va aimer cet autre enfant aussi bien et autant qu’elle a aimé le premier. Si cette question angoisse toutes les femmes peu s’autorisent à en parler parce qu’elles n’osent pas faire état de cette inégalité d’investissement.»

Moi-même j’ai parfois peur de ne pas investir autant la relation avec ce deuxième enfant que je l’ai fait avec ma première. Et puis j’imagine souvent attendre exactement le même bébé que la première fois. Comme si j’espérais un petit clone de ma fille, alors que je sais très bien que ce n’est ni souhaitable ni possible… Et puis la seconde suivante la raison l’emporte et je me dis que j’aimerais  tout autant cet enfant y compris parce qu’il sera différent de sa grande sœur et déjà tellement unique…

Cela nous a aussi amené à parler de la jalousie de l’aîné envers le bébé qui va arriver. Je raconte à ma sage-femme que pour le moment la plume est enchantée de cette future naissance, qu’elle prépare presque autant que nous ! En effet, c’est elle qui a décidé de lâcher son lit à barreau afin de le donner au bébé, et c’est elle qui a décidé d’être propre le jour où elle a voulu lui donner sa table à langer ! Ce bébé qui arrive lui permet déjà de se positionner en tant qu’aînée.

Et puis l’annonce de cette future naissance était une véritable joie pour nous et donc par ricochet aussi pour elle.

Ma sage-femme me dit d’ailleurs que les enfants jaloux dès l’annonce de l’arrivée d’un petite frère ou d’une petite sœur, le sont essentiellement à cause de la manière dont les choses leurs sont dites. Effectivement si on dit à un enfant de 3 ans « Il va y avoir un bébé à la maison, il faudra être sage, laisser papa et maman un peu plus tranquilles, être gentil avec le bébé, lui prêter tes jouets… », c’est sûr que ça ne les enchante pas. Alors que si les choses leur sont présentées comme une future richesse pour lui et la famille, cela permet de mieux faire passer les quelques futures contraintes liées à cette future naissance.

Enfin, nous avons évoqué le deuil du p’tit dernier. J’en ai déjà parlé il y a quelques temps dans ce blog : Je n’arrive pas à me dire que ce bébé sera le dernier. Et si c’est le cas, je crois que je passerai beaucoup de temps à me dire : « Oui mais peut-être que bientôt on fera le petit troisième ». Et c’est bien légitime n’est ce pas ? Ma sage-femme me dit que même au troisième enfant cette question se pose souvent, elle se pose après chaque naissance finalement. Et c’est vrai que de se laisser dans son esprit l’éventualité d’une future naissance, permet même si cela n’advient pas, de laisser plus aisément grandir et nous échapper un peu nos enfants…

C’est vrai, qui n’a jamais cherché à garder son petit encore bébé le plus longtemps possible ?

A la mère si