Apprendre oui, mais tout en douceur {mini-débrief}

Quand on est parent, on est toujours pressé. Non, pas pressé par le temps, enfin si mais ce n’est pas le sujet. Non, on est pressé de voir notre enfant grandir, et ce, dès qu’il est né.
« Quand est-ce qu’il sourit ? Quand est-ce qu’il va se tenir assis, puis marcher ? Et quand aura-t-il des dents ? Quand est-ce qu’il va courir ? Et les couches, quand est-ce qu’il va faire au pot ? »
On regarde toujours l’étape suivante au lieu de profiter du moment présent. On aimerait parfois appuyer sur le bouton « accélérer » alors que le temps passe déjà si vite.

Le moment présent, voilà ce qui importe le plus finalement dans la vie d’un être humain, et d’autant plus lorsqu’il s’agit d’apprentissage. Comment l’enfant peut-il « positiver » et capitaliser le moment vécu si l’adulte le projette dans le futur constamment ? Comment lui faire croire que vivre ce qu’il vit au présent – être enfant – c’est bien ?

Je reste persuadée que l’acte prime sur le résultat : je m’explique. Le moyen reste à valoriser sur la fin. Par exemple : ma fille fait un puzzle. J’essaie d’être attentive aux gestes, à sa manière de procéder plutôt que de me dire « va-t-elle le finir » – même si finir une action est  un apprentissage qui me paraît primordial.

Tout ça pour dire que l’apprentissage est important et qu’il est souvent chargé d’enjeux… d’adultes.

Pour être plus concrète, Mamanmaispasseulement nous parle du délicat sujet des devoirs à la maison, véritable corvée pour les parents. Derrière les devoirs, il y a les résultats scolaires. Et la réussite de son enfant à l’école. Que l’on projette comme une réussite dans la société. Dans la vie en générale. Si mon enfant travaille bien à l’école, il aura toutes les chances de réussir – ce qui n’est pas faux mais pas obligatoire. Seulement en raisonnant de la sorte, finalement, on en oublie de lui faire aimer le goût de l’effort gratuit, sans but : on peut apprendre pour le plaisir, par curiosité. Pas seulement pour avoir des bonnes notes. Et je suis bien placée pour le savoir : j’ai toujours eu des notes moyennes et des « peut mieux faire ». Mes parents n’étaient jamais contents de mes notes. Et finalement moi aussi. Pourtant j’avais la moyenne, juste la moyenne.Pourtant j’aimais apprendre (et c’est toujours le cas aujourd’hui). J’ai même failli redoubler. Brrr. Et alors ? Et alors j’ai eu mon premier semestre de droit haut la main, j’ai un DEA d’art contemporain avec une mention « bien » ratée à 0,25 point. J’ai réussi dans mes études. Même si ce n’est pas le cas professionnellement. Aujourd’hui, ce qui compte, c’est le réseau. Pas les diplômes. Et puis la vraie réussite dans la vie, c’est quoi : trouver l’amour ou un travail payé moyennement avec un boss pourri ? L’incidence de la réussite scolaire dans la vie me semble vraiment infime. Mais voilà : il y a dans les apprentissages des projections de nous en tant que parents. Des enjeux qui viennent interférer. Un autre exemple plus parlant peut-être : la nourriture et donc l’apprentissage de l’autonomie. Combien de maman (comme moi par exemple hein) mettent la pression pour que l’enfant finisse son assiette – alors qu’il n’a plus faim – ou ne se salisse pas en mangeant seul -alors que ce qui compte c’est faire seul ? Il faut se poser la question : »Pourquoi cela est important pour moi ». Et souvent on trouvera la réponse dans notre propre enfance, dans l’histoire de notre famille. En seconde, j’étais destinée à partir en couture (je rêvais d’être styliste). Au dernier moment, on m’a mise dans le général. Mon père ouvrier, mes grands-parents paysans, des études finies bien avant le bac, voilà ce qui a dû motiver mes parents à cet acte… qui n’était pas mon souhait… sinon celui de mes parents persuadée qu’il fallait faire des études pour mieux réussir qu’eux… Quoi qu’il en soit, Mamanmaispaseulement se pose des questions et donnent des solutions pour sortir du cercle vicieux qui nous pend tous au nez du stress des devoirs. Fatigués de la journée de travail, il faut trouver des ressources pour être disponibles dans cet apprentissage essentiel. Et avoir la juste distance… plus facile à dire qu’à faire. Et puis, plus qu’aider l’enfant à réussir à l’école, ne serait-ce pas plutôt réussir à aimer apprendre auquel il serait bon de veiller, en tant que parent ou professeur ?

D’ailleurs finalement, cette pression de réussite, elle peut très vite s’instaurer, dès les premières années de vie de l’enfant. Notre bulle à nous évoque la mode des bébés savants, cette course à la réussite dès le berceau. Apprendre le plus tôt pour réussir plus tard, voilà ce qui motive les parents adeptes de ces pratiques. C’est vrai, c’est tentant, les bébés sont de vraies éponges, alors pourquoi ne pas les bourrer de tout un tas de connaissances ? Leur apprendre l’anglais, un instrument, tester continuellement leur mémoire ? Ils sont capables de véritables prouesses au niveau de la mémoire. Seulement voilà : un enfant n’est pas apprentissage. L’enfant est expérimentation avant tout. Et jeu ! Il apprend par le jeu, au fur et à mesure de ses découvertes, de ses capacités motrices et cognitives. Naturellement. Pour respecter le rythme de son enfant… il suffit de le laisser faire. Lui seul peut nous dire son rythme d’apprentissage. Et puis comment apprendra-t-il à connaître ses besoins si on les lui crée ou suscite à sa place ? Comment peut-il s’écouter plus tard si nous ne l’avons pas écouter ? Notre bulle à nous évoque justement la notion du temps, celui de l’enfance, qui ne dure qu’un temps et qui est si précieux. Laissons-les grandir. Doucement, mais sûrement. Laissons-les être des enfants, chaque jour. Profiter du jour présent et ne pas les projetter dans notre monde d’adulte, plein de tracas et de dures réalités. Ce que j’aime beaucoup dans la réflexion de Notre bulle à nous, c’est l’idée aussi de laisser à disposition les outils de connaissance à l’enfant. Un enfant est, à mon sens, naturellement curieux. Laissez traîner un livre et tôt ou tard, il s’ouvrira, tranquillement, sans que l’on pousse l’enfant à le faire. Car là est la meilleurs manière d’apprendre à mon sens : en écoutant sa curiosité. D’ailleurs, elle est à mes yeux la plus jolie des qualités – et non un défaut comme le veut l’adage – qui s’envole trop souvent à l’âge adulte.

Si cette notion du respect du rythme de l’enfant vous plaît, alors la participation de ClemLaMatriochka sur les théories de Maria Montessori va vous passionner. Le principe : accompagner son enfant et l’encourager. C’est lui qui nous guide dans ses besoins d’apprentissage. On n’outrepasse pas ses capacités, et on le laisse maître à bord du vaisseau, de SON vaisseau finalement. Il sait ce qui est bon pour lui et ça, c’est assez essentiel dans une vie, depuis le berceau, jusqu’à l’âge adulte. Et puis franchement, un enfant que l’on ne « stimule » pas va-t-il rester sans rien faire ? Un enfant n’explore-t-il pas instinctivement son environnement ? Apprendre finalement n’est pas tout simplement ce qu’il y a de plus évident chez l’être humain, voire animal ? L’être humain s’adapte à son environnement et ce depuis le plus jeune âge. On oublie parfois que l’Homme est sur terre depuis bien longtemps et qu’il a su faire perdurer l’espèce sans livre lui apprenant à éveiller son enfant, sans jouets sophistiqués… Il apprend pour survivre dans son environnement, tout simplement. Apprenons donc à désapprendre nos réflexes d’êtres vivants dans une société moderne qui est dans la course effrénée de la réussite et du mieux. Le mieux n’est-il pas l’ennemi du bien ?

Pour faire simple : carpe diem !

Kiki the mum

5 réflexions sur “Apprendre oui, mais tout en douceur {mini-débrief}

  1. Je lis encore aujourd’hui ce super article. Merci aux Vendredis Intellos qui m’apportent énormément. Je trouve super intéressant ton point de vue sur la curiosité. Tout être vivant aime apprendre. C’est en se confrontant à des situations diverses et variées que l’enfant apprend. Il peut le faire je crois tout naturellement. C’est souvent nous adulte qui l’empêchons d’apprendre à son rythme et qui le détournons de l’envie d’apprendre et de se questionner sur le monde qui l’entoure. Encore une grande question pour moi en tant que maman, que maîtresse: comment accompagner son enfant, l’enfant dans ses découvertes?

  2. Bel article ! Laissons en effet les enfants expérimenter ! :) J’en ai un sur le feu qui aborde un aspect proche mais pas identique ;)

  3. Merci pour ton article où je te suis sur tout ce que tu dis sauf un point : « Aujourd’hui, ce qui compte, c’est le réseau. Pas les diplômes. » Ce n’est malheureusement toujours pas le cas en France où nous sommes un pays du diplôme. Certains employeurs préfèrent encore embaucher un bac +5 sans expérience plutôt qu’un bac+2 avec 10 ans d’expérience. Dans les pays anglo-saxon cela est très différent on a plus confiance en l’individu, en ses capacités d’adaptation, de formation…

    • Oui je suis d’accord avec toi. Mais entre personne diplômée ou expérimentée et une moins « performante » mais qui connaît le fils du patron.. ben souvent le relationnel prime. Du moins c’est ce que j’ai pu observer de très nombreuses fois autour de moi et dans mon expérience professionnelle. Et effectivement, on ne fait pas confiance à l’aptitude des individus… surtout quand on est une mère au foyer qui veut reprendre le travail…. mais là c’est un autre sujet…

  4. Merci beaucoup de ton débrief!!! Et merci aussi de nous avoir fait partager tant de bribes de ton histoire et de ton expérience personnelle!!
    Je ne saurais dire qui des diplômes ou du réseau est le plus important pour « réussir » dans la vie mais ce que je vois c’est à quel point les parents souffrent au travers leur enfant du rapport qu’ils ont entretenu eux même entretenu avec l’école… échecs cuisants, peur de décevoir, sentiment de ne pas avoir fait ce qu’il fallait, de ne pas avoir bénéficié de l’environnement idéal, d’avoir été malmené, incompris, etc… Je suis bien placée pour dire que même quand tout a été en apparence idyllique, on a toujours un peu à se « guérir » de nos années d’école sous peine de projeter sans même s’en rendre compte nos propres peurs sur nos enfants…!
    Je terminerai sur Montessori pour dire que selon moi, il s’agit bien plus que simplement de laisser les enfants évoluer à leur rythme… il faut être attentif à leurs demandes implicites, à leurs besoins cognitifs afin par exemple d’être en mesure de repérer les « périodes sensibles » et d’être prêts à répondre à leurs attentes dans ces moments là!!! Mais je crois que Muuuum prépare un VI à ce sujet!!

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