A nouveau cette semaine, c’est un article paru dans Courrier International (CI n° 1095 – 27.10.11), intitulé «Deux millions d’enfants envoyés aux champs » qui m’a inspirée :

« La tradition soviétique de mobilisation de toute la main-d’œuvre disponible pour la récolte du coton perdure dans les républiques d’Asie centrale. Et ce à grande échelle, car “en dépit de l’engagement de ces pays de ne plus recourir au travail des enfants, tous les ans en septembre et octobre, près de 2 millions d’enfants ouzbeks [y compris les 6-7 ans]” sont envoyés dans les champs de coton ».

Y compris des enfants de 6-7 ans… qui, comme le souligne l’article, s’ils “doivent bien sûr aider leurs parents, derrière les paroles sur le devoir des fils se cache une réelle exploitation des enfants”.

Evidemment, quand on lit cela, on se dit bien vite qu’on va faire en sorte d’éviter d’acheter des vêtements issu du travail d’enfants…

Mais un boycott, tel « le boycott du coton ouzbek déclaré en septembre par 60 marques internationales de vêtements » dont parle l’article paru dans Courrier International, s’il peut apparaitre à première vue comme un moyen de lutter contre l’exploitation des enfants (et une manière de se donner bonne conscience ?) peut s’avérer en définitive très néfaste pour les enfants travailleurs eux-mêmes. En cherchant des informations sur le sujet, je suis en effet tombée sur un article de blogtenu par une personne militant dans des associations de solidarité nationale, qui explique les conséquences néfastes de tels boycotts de produits issus du travail des enfants :

« En 1992, une loi interdisant l’import de produits fabriqués par des enfants de moins de quinze ans était proposée au sénat américain. La loi n’était pas encore votée qu’une panique a débuté dans l’industrie du vêtement au Bangladesh, entraînant le licenciement d’un grand nombre d’enfants. Une étude a révélé qu’une grande partie de ces enfants avait trouvé une activité plus dangereuse et moins bien payée telle que la prostitution. »

Donc empirer la situation en croyant bien faire (et en n’étant pas au fait des réalités de terrain…). Le problème majeur réside dans le fait que

« une interdiction pure et simple du travail [des enfants] ne peut suffire à régler le problème, car l’illégalité déclarée peut priver les enfants actifs de la protection qu’accorde la législation du travail aux adultes »

L’auteur du blog précise aussi, que, contrairement à une idée reçue fort répandue (que j’étais la première à avoir avalée…), commerce équitable et travail des enfants ne sont pas antagonistes :

« Contrairement à ce que l’on pourrait penser, certains organismes de commerce équitable n’interdisent pas de façon systématique le travail des enfants. L’IFAT [Association Internationale de Commerce Equitable] par exemple, précise que si jamais des enfants travaillent, leur activité ne doit pas gêner leur bien-être, leur sécurité, leur éducation et leur besoin de jouer, et qu’elle doit être en conformité avec la convention des Nations Unies sur le droit des enfants, et la loi locale. »

Evidemment, pour un occidental vivant dans un pays « riche », le travail des enfants nous semble une réalité horrible qu’il faut à tout prix combattre… sauf que pour certains enfants, leur situation serait bien pire s’ils ne pouvaient pas travailler. En effet, comme le souligne le site La voix des enfants actifs, « leur condition [de travail] peut varier du tout au tout, allant d’une aide aux travaux des champs permettant une scolarisation, aux pires formes d’exploitation. Toute forme de travail des mineurs n’est donc pas condamnée ou condamnable. »

Ce site nous explique qu’un droit les plus précieux à défendre pour les enfants travailleurs est le  « protagonisme » :

« les Enfants et Jeunes Travailleurs (EJT) revendiquent non seulement le droit à la parole et à l’écoute, mais aussi celui d’être systématiquement consultés sur toutes questions les concernant, et à tous les niveaux de gouvernance (local, national et international). »

Il ne s’agit plus simplement pour les enfants actifs d’être écoutés, que des adultes « prennent leur défense », mais bien que les enfants eux-mêmes puissent être acteurs de leur devenir :

« On peut supposer qu’un jeune, qui durant son enfance a appris à connaître ses droits et à les défendre, à exposer son opinion dans une tribune et à faire valoir ses expérience et initiatives sera sans doute un citoyen plus engagé et responsable que s’il n’avait pas eu cette opportunité. »

En tous cas, voilà qui m’a donné à réfléchir!

Mamaurèle