Je ne suis pas russe mais j’ai appris cette langue parce que je la trouve belle et que je fréquente beaucoup de Russes (ou de gens d’origine russe), notamment le chef de mon coeur. Il a très envie de transmettre cette culture à nos enfants et moi, je trouve que c’est une richesse pour eux. Alors, je leur parle russe. Ce n’est pas ma langue maternelle, pourtant c’est celle qui me vient naturellement quand je m’adresse à des enfants.

Généralement, les gens trouvent ça bien (sauf quelques sceptiques). Là où les avis divergent et où les conseils sont nombreux, c’est à propos du « comment ». J’ai donc voulu en apprendre un peu plus et j’ai acquis Le défi des enfants bilingues de Barbara Abdelilah-Bauer. Je n’ai pas encore tout lu mais j’ai déjà assez de matière pour vous en parler.

Elle commence par rappeler que si le monolinguisme est plutôt la norme en France (et encore), ce n’est pas le cas dans la majorité des pays.

La moitié, au moins, de la population mondiale est bilingue ou plurilingue.

Sur quelques deux cent vingt-quatre Etats dans le monde, vingt-neuf seulement peuvent être considérés comme monolingues. Malgré cette réalité, l’idée de l’effet négatif du bilinguisme précoce a hanté l’inconscient collectif pendant de longues années.

Selon l’INSEE (2002), « un adulte sur quatre se souvient que l’un de ses parents lui parlait habituellement une autre langue que le français dans son enfance. »

De là découle bon nombre d’idées reçues sur le bilinguisme :

Dans l’opinion publique, le mélange des langues mettrait en péril l’apprentissage de la langue française, dont tout le monde conviendra qu’elle est nécessaire pour l’égalité des chances et la réussite scolaire dans notre pays.

Or, l’auteur explique qu’on ne peut pas comparer :

Le bilinguisme n’est pas simplement une juxtaposition de deux compétences linguistiques, c’est un état particulier de compétence langagière qui ne peut être évalué avec les termes de la norme monolingue.

Je trouve que ce livre est passionnant parce qu’il pousse à voir les choses d’un autre point de vue. Je vous parlerai une prochaine fois du chapitre sur le bilinguisme précoce simultané (l’apprentissage de deux langues en même temps de 0 à 3 ans, c’est le cas de mes enfants). Aujourd’hui, je souhaitais surtout revenir sur quelques idées reçues et montrer, grâce à ce livre, que le bilinguisme n’a rien d' »anormal » (au sens de « sortant de la norme »). L’idée n’est pas de dire que les bilingues sont meilleurs, c’est ce qui me plaît aussi dans ce livre, mais de montrer leur spécificité. En voici un bel exemple :

La langue est comme un prisme à travers lequel on voit le monde et avec l’aide duquel on se comporte dans le monde. L’enfant qui grandit avec deux langues et est en contact avec deux communautés linguistiques découvre très tôt que les visions du monde sont toutes relatives. Il a une conscience des différences culturelles que n’a pas forcément le monolingue.

 

Clem la matriochka