Dans une société de plus en plus libertine, où les termes d’échangisme et de lutinage émergent, certains se demandent si la monogamie est naturelle ou si elle n’est pas une construction culturelle.

Un article de Sciences Humaines a choisi d’étudier le comportement animal pour en savoir davantage. Dans la grande majorité, le modèle est la polygynie: un mâle pour plusieurs femelles. La raison invoquée est que les mâles peuvent féconder plusieurs femelles, puisqu’un seul spermatozoïde suffit à féconder un ovule, alors que ces dernières n’ont besoin que d’un mâle pour se reproduire. C’est le modèle le plus répandu et qui paraît être le plus naturel.

Les espèces monogames, comme 95% des oiseaux, le sont par contrainte environnementale ou anatomique. Ainsi, les oiseaux mâles sont obligés de couver les oeufs lorsque la femelle quitte le nid pour se nourrir, au risque de les perdre. Il est donc difficile pour eux d’avoir plusieurs concubines! Un territoire trop étendu est également un frein dans la mesure où le mâle ne peut protéger toutes ses femelles et leurs progénitures. Cependant, il est important de distinguer monogamie sociale et monogamie sexuelle: beaucoup sont les mâles qui prennent soin de petits qui ne sont pas les leurs…

Seul l’hippocampe fait figure d’exception. La femelle place les oeufs fécondés dans le ventre du mâle qui se charge de l’incubation et ils seront fidèles l’un à l’autre toute leur vie: la femelle n’engrossera pas d’autre mâle et le mâle n’acceptera pas d’autres oeufs. Par ailleurs, ils multiplient les rituels et cérémonies d’attachement et s’excitent s’ils s’éloignent de plus de cinquante centimètres l’un de l’autre. Bel exemple d’amour indéfectible!

Le questionnement sur la monogamie humaine n’est pas nouveau mais son but n’a pas toujours été le même:

Au xixe siècle, Rémy de Gourmont doutait de trouver une espèce animale se conformant à la monogamie idéale, pour justifier la monogamie des humains : « Il n’y a d’animaux monogames que ceux faisant une seule fois l’amour dans leur vie. (…) Il y a des monogamies de fait ; il n’y en a pas de nécessaires, dès que l’existence de l’animal est assez longue pour lui permettre de se reproduire plusieurs fois », n’hésitait pas à affirmer l’écrivain. La question de la monogamie chez les animaux est tangible dès le siècle des Lumières. Il s’agit de justifier par la « nature » le modèle de conjugalité des humains imposé jusqu’ici par l’Église. Au xviiie siècle, le naturaliste Buffon vantait les mérites de l’union monogame chez les oiseaux en qui il reconnaissait « plus de tendresse, plus d’attachement, plus de morale en amour » que chez la majorité des quadrupèdes.

Selon moi, il s’agit de corroborer ou non une cause. Longtemps, la monogamie était économique: le père devait pouvoir léguer son héritage à ses propres enfants et non à des bâtards. On peut aussi parler de monogamie morale: moins on se disperse dans les désirs sexuels, plus on se concentre sur l’Eglise et ses préceptes.

Car n’oublions pas que le désir est la principale raison qui distingue notre activité sexuelle de celle des animaux. Nous sommes les seuls à avoir des relations sexuelles pour le plaisir et non seulement pour la fonction reproductive. [Edit: plus de détails en commentaire] L’évolution de notre système nerveux nous a conduit à une multitude de conduites et d’états mentaux. L’article conclut en ces termes:

L’identité sexuelle de l’Homme se construit dans un référentiel culturel et économique.[…] La question de savoir si l’espèce humaine est monogame ou polygyne ne se pose ainsi pas en des termes naturalistes.

Et on le voit simplement en observant nos différentes cultures, loin d’être toutes monogames. En tant qu’êtres humains, nous avons le choix de notre partenaire et de notre vie de couple, l’article va jusqu’à employer le terme de « monogamie sérielle », évoquant la succession de relations monogames dans une vie.

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