650 000. C’est à peu près le nombre de personnes touchées par le bégaiement en France, ce qui représente environ 1% de la population (au moment où les auteurs du document dont je vais vous parler l’ont écrit) et les hommes y seraient plus sujets que les femmes (3 hommes pour 1 femme).
Chacun peut être concerné puisque le bégaiement affecte des hommes et des femmes issus de tous milieux sociaux et culturels.
Et parmi ces 650 000 personnes se trouvent mon Barbu et mon mistouflon.

Mon Barbu bégaie (par moments), je l’ai toujours connu ainsi. Il le vit très bien et semble nullement en souffrir.
Mes recherches sur le bégaiement ont commencé quand mon Mistouflon s’est lui-même mis à bégayer, comme ça, du jour au lendemain.
C’est en farfouillant sur le net que je suis tombée sur un document de l’Association Parole Bégaiement (APB) (on clique ici pour le lire) qui traite du bégaiement chez l’enfant.

Si l’on se réfère au dictionnaire, le bégaiement est un « trouble de la parole, d’origine psychomotrice, se manifestant par l’impossibilité de prononcer une syllabe ou une voyelle sans la répéter, et par un débit ralenti des mots » (définition extraite du dictionnaire HACHETTE encyclopédique).
Cette définition me parait légèrement incomplète et je trouve que si on lui associe celle du LAROUSSE, ce serait presque parfait : « Perturbation de l’élocution, caractérisée par l’hésitation, la répétition saccadée, la suspension pénible et même l’empêchement complet de la faculté d’articuler. »

Pour l’APB, le bégaiement peut être décrit ainsi :

« Une suite d’accidents de la parole, le plus souvent en relation avec une augmentation de tension, qui en altère la fluidité : répétitions de sons, de syllabes, blocages, prolongations de sens, accompagnés ou non de mouvements involontaires : clignement des yeux, mouvements de la tête… »

L’association explique aussi qu’on est en mesure de dire qu’un enfant bégaie quand l’un ou plusieurs des signes suivants sont observés :

– Lorsqu’on a le sentiment qu’il fait des efforts pour parler,
– Lorsqu’il abandonne ce qu’il veut dire,
– Lorsqu’il répète ou prolonge des sons avec tension,
– Lorsqu’il ne regarde plus son interlocuteur.

Le bégaiement débute, le plus souvent, entre 2 et 4 ans, c’est-à-dire au moment de l’acquisition de la parole et du langage. Si rien n’est entrepris, sur 4 jeunes enfants commençant à bégayer, l’un d’entre eux béguera à l’âge adulte. […] Il est donc important d’intervenir de manière précoce. »

Mon Mistouflon a commencé à parler vers 12-18 mois, sans aucune difficulté.
A 2 ans ½, lors de son entrée à l’école, il s’exprimait très bien, même s’il avait tendance à ne pas terminer les mots.
Son bégaiement s’est installé petit à petit et j’en ai pris conscience un bon mois après sa rentrée.

Connaissant la hantise du Barbu de voir son fils bégayer, j’avais vite pris les devants pour aider notre Mistouflon : discussion avec l’instit pour voir si elle avait repéré des moments où il bégayait plus que d’autre, avec le médecin traitant pour connaître son avis et savoir s’il fallait déjà entamer quelque chose,…
A l’école, on nous a dit d’attendre le bilan des 3-4 ans. Notre médecin traitant nous a, au départ, conseillé de surveiller, voir l’évolution et au moindre changement, de revenir le voir pour obtenir une ordonnance pour un bilan.
Il faut dire qu’à l’époque, mon mistouflon ne bégayait pas tout le temps, juste par périodes, à l’approche des vacances et quand il était fatigué.

A la fin des vacances d’été, le Barbu et moi avons bien senti qu’il était temps d’agir parce que ce trouble s’installait : notre Mistouflon bloquait parfois sur certains mots, répétait plusieurs fois le même son/la même syllabe/le même début de phrase et surtout, il lui arrivait de détourner la tête quand il parlait.

Ni le Barbu ni moi ne savons ce qui a déclenché ce trouble mais on savait déjà qu’un seul facteur ne suffisait pas pour le déclencher.
Et surtout, on connaissait déjà l’existence du facteur génétique.

« Le risque d’avoir un enfant qui bégaie lorsqu’on bégaie soi-même est 3 fois plus grand que pour un parent non bègue ».

D’autres facteurs prédisposent au bégaiement : les souffrances psychologiques durant la petite enfance et les difficultés de développement de la parole et du langage.

Certains facteurs précipitent le bégaiement comme un déménagement, une naissance, l’entrée à l’école, des journées chargées où on en demande toujours plus et toujours plus vite à l’enfant,…

D’autres enfin font perdurer le bégaiement tels que les efforts demandés par l’entourage de l’enfant (ou par lui-même) pour améliorer sa façon de parler, le déni face à ce trouble, …

L’enfant qui bégaie peut ressentir (entre autres) du désarroi, de la colère, de l’incompréhension de la part des autres.
L’APB estime qu’il est important pour l’enfant de mettre des mots sur son bégaiement, ceci dans le but de l’aider « à sortir de la peur d’être jugé comme incompétent, anormal… »
En effet, plus le sujet est tabou, plus l’enfant aura tendance à se renfermer sur lui-même pensant qu’il est coupable de bégayer, qu’il fait mal et que par conséquent, il n’est pas comme les autres. Il perdra alors confiance en lui et cela pourra le conduire vers l’isolement et l’anxiété.

On ne sait pas exactement ce que ressent notre mistouflon quand il bégaie. On l’a parfois vu lutter pour avancer sa phrase (et je vous assure que ça fait super mal au cœur) ou trouver une sorte de « mot magique » pour débuter une phrase sans encombre (il utilise souvent la formule « et puis »).
Il sait que son bégaiement se soigne, qu’on fait de notre mieux pour l’aider.

« L’expérience clinique met en évidence qu’une intervention orthophonique préventive, dès l’âge de 2 ans pour les enfants débutant un bégaiement, est d’une grande efficacité.
A l’inverse, plus l’enfant aura « appris » à bégayer, plus la démarche sera complexe. Cette intervention permettra, à vous parents, de réagir de façon adaptée au bégaiement de votre enfant et d’ajuster vos niveaux d’exigences à ses capacités du moment. Ceci pour 6 mois au moins. »

Le bilan orthophonique, j’y avais déjà pensé l’année dernière mais plusieurs personnes nous avaient dit que le bégaiement disparaissait dans 3 cas sur 4 vers 5/6 ans.
J’avais donc mis cela de côté mais l’accentuation des soucis m’a fait changer d’avis et nous avons réalisé ce bilan il y a 10 jours auprès d’une orthophoniste (il nous a fallu quand même plus d’un mois pour obtenir un RDV).
1h30 de discussion sur nous, notre façon de vivre, le rythme de nos journées, celui de nos enfants et du mistouflon en particulier, les évènements marquants (et potentiellement perturbants) depuis ma grossesse du mistouflon, sa façon d’être,…
Tout ça en sa présence, pour qu’il entende que nous étions là pour lui, pour l’aider.

Un rendez-vous capital qui a permis de mettre en lumière un deuxième problème chez notre petit garçon : un léger retard de parole, détecté par ses fins de mots non prononcées. « Guérir » ce retard permettrait d’atténuer voire de faire disparaître le bégaiement.

L’orthophoniste a insisté sur le fait que l’essentiel était que notre mistouflon communique et qu’il ne fallait pas fixer notre attention sur la façon dont il parle mais sur ce qu’il pense/veut dire.

Elle nous a aussi donné quelques pistes pour aider notre mistouflon :
–      Ne pas lui dire « calme-toi, respire, prends ton temps,… ». Autant de conseils qui nuisent à la guérison car ils alimentent au contraire le bégaiement.
–      Rattraper son regard quand il fuit en caressant son visage tout en l’amenant à nous regarder à nouveau et en lui indiquant « je te regarde ».
–      Préférer les questions fermées.
–      Reformuler ses pensées à l’aide d’un « est-ce bien cela que tu veux me dire ? ».
–      Diminuer les sources d’excitation, de fatigue, de stress.
Ici, on a réduit le temps passé devant la télé et fixé des règles sur lesquelles on transige le moins possible (le Barbu et moi n’avons pas la même façon de voir la télé pour les enfants : lui le voit comme une sorte de solution lui permettant d’avoir 5 minutes de tranquillité, moi comme un danger). On tente aussi de ne plus répéter toutes les 5 minutes « dépêche-toi », « fais-vite », « on est en retard », …

Tout ça pour dire que le bégaiement n’est pas une fatalité, ça se soigne. Il faut toutefois savoir en reconnaître les signes, se faire aider et modifier son comportement ainsi que celui de l’entourage pour le voir disparaître ou au moins mieux vivre avec.

Maman Grenadine