On a coutume d’entendre parmi les conseils (maternité, sites internet, ouvrages, mots d’experts, paroles de mamans) pour encourager l’allaitement qu’ « il faut allaiter à la demande ». Oui mais, attention, car cette expression est ambiguë !

Je reçois hier le dernier numéro de la revue « Les dossiers de l’allaitement » à laquelle, je suis abonnée depuis 3 ans maintenant (pour celles et ceux qui ne connaissent pas, il s’agit de la revue éditée par LLL à destination des professionnels de santé, concernant les résultats d’études autour de l’allaitement, conseils de consultantes en lactation etc…). Il n’est à priori pas à visée « grand public » comme indiqué sur le site mais il est tout à fait possible pour un particulier de s’y abonner. Je trouve cette revue très intéressante pour les synthèses bibliographique qui y sont présentéeq : on y trouve vraiment des informations très utiles (je n’ai aucune formation spéciale, ni médicale ni en lactation mais passionnée par ce sujet,  j’y trouve pourtant mon compte !).

Bref, j’aimerais vous faire un petit résumé d’un article qui a attiré mon attention et qui me semble important dans la portée qu’il peut avoir pour les mamans qui s’inquiètent de la faible prise de leur bébé malgré un allaitement qui suit à la lettre ce précieux conseil de l' »allaitement à la demande ». Cet article est écrit par un médecin généraliste lyonnais (Dr MArtine Fauvel) qui nous fait part de son avis sur la question (sur la base de son expérience clinique).

Concernant donc cette préconisation de l’allaitement à la demande, l’auteur nous dit  » L’allaitement « à la demande » fait partie des conseils couramment dispensés aux mères, mais mon expérience m’a permis de constater que cette recommandation est aussi une source de difficultés« .
Elle nous précise « L’expression manque de précision et permet des sous-entendus« .
Viennent ensuite quelques exemples de dérives, lorsque l’expression est prise au pied de la lettre; notamment chez un bébé qui ne réclame pas assez !

1) Faible prise de poids
La maman qui suit le conseil à la lettre, attendra donc bien sagement que son bébé se réveille et réclame la tétée. Malheureusement,  certains enfants réclament peu, dorment beaucoup (notamment les bébés de faible poids de naissance, parce qu’ils sont  encore souvent dans une phase où ils ne comprennent pas leurs propres besoins, et peuvent confondre « dormir » et « manger » avec le risque d’emballement de la situation. Moins bébé mange, moins il prend de poids et plus il essaie de fonctionner à l’économie : il dort, pleure peu etc…). L’impact sur la prise de poids est donc de taille.

Attention aussi aux bébés qui font leurs nuits trop vite ! Sujet qui fait beaucoup parler car tous les parents ont envie de dormir rapidement des nuits complètes.

D’ailleurs en complément, sur le site de la LLL, on lit :  » la maman dont le bébé est allaité à la demande produira suffisamment de lait pour son bébé…MAIS A CONDITION que la demande soit suffisante et bien perçue, que la succion du bébé soit efficace et que la tétée soit complète.« 

Il est recommandé, dans ces cas là, de conseiller aux mamans, la surveillance des signes d’éveil.

FP5

2- Engorgement des seins
Si le bébé ne tète pas suffisamment fréquemment, et que la lactation est déjà bien en place, la maman va se retrouver avec des risques d’engorgement, si elle hésite à réveiller son bébé (parce qu’elle veut suivre le conseil d’allaitement à la demande du bébé).

3- Épuisement des mères
On entend souvent dire également, que l’allaitement fatigue … NDLR Je pense que s’occuper d’un bébé, réorganiser sa vie en conséquence est plutôt la réelle source de fatigue…
Mais l’auteur nous informe qu’effectivement l’allaitement deviendra fatiguant et perçu comme une contrainte si la maman devient dépendante de la demande de son bébé. Anticiper un peu une tétée, avant que l’enfant réclame, n’est pas dangereux pour l’enfant !

Conclusion de l’auteur  » Prôner l’allaitement à la demande, avec ce que l’expression a d’ambigu, n’est-ce pas faire prendre à la mère le risque de se décharger sur son bébé de la responsabilité des tétées? »
«  L’allaitement à la demande, mérite qu’on y réfléchisse, car cette recommandation n’a pas fini de circuler dans le langage courant des services de maternité et de PMI, et à leur suite dans les familles« 

Mes commentaires
Je suis assez d’accord avec l’analyse qui a été faite. JE pense que le conseil « d’allaitement à la demande » est un peu réducteur.

Effectivement, il va bien fonctionner pour les bébés très demandeurs ce qui, d’après ma maigre expérience (mes propres enfants et ceux que j’ai été amenée à côtoyer) est quand même une grande majorité de cas. Dans cette situation-là, la mère s’inquiétera plutôt de la grande fréquence des tétées (mon cas pour mes deux premiers allaitements) et de son corollaire quasiment inévitable « est-ce que mon lait est assez nourrissant ? » L’expression « allaiter à la demande » va donc la rassurer en lui indiquant que la situation de tétée fréquente est normale.

Par contre, pour les gros dormeurs, « allaiter à la demande » peut induire une confusion dans l’esprit des mamans : en lui faisant croire que le nourrisson sera capable de réclamer quand il a faim. Mais durant les premières semaines, il n’en est rien. Dans ce cas, il faudra allaiter « aux signes d’éveil ». J’ai vécu cette petite expérience, à mon retour de maternité suite à la naissance de mon 3e bébé. La faible prise de poids des deux premières semaines, a donné l’alerte à une consultante qui m’a alors expliqué que j’attendais trop longtemps avant que mon enfant réclame. C’est là que j’ai appris à observer les signes d’éveil (allaiter avant que l’enfant ne pleure car dans cette situation il est déjà fatigué d’avoir pleuré, et tétera moins efficacement).

Bref, l’expression « allaiter à la demande dès les premiers signes d’éveil me semble plus appropriée »… un sujet déjà abordé dans les Vendredis Intellos ICI

Et vous les mamans, qu’en pensez-vous ?

Pascale72

Article publié sur mon blog ICI