Ma principale angoisse actuelle concerne la réaction de Pti Tonique à l’arrivée prochaine de notre bébé dans la famille ainsi que mon temps disponible, que je vais devoir partager entre mes deux enfants, en sachant pertinemment que le nouveau-né aura des besoins qui vont m’absorber énormément. Je culpabilise d’avance du manque d’attention que risque de ressentir mon fils.

C’est pourquoi j’ai commencé ma quête de réponses (et de ruses !) avec le livre « Relations frères-soeurs – du conflit à la rencontre » de Catherine Dumonteil-Kremer. J’y ai trouvé plein de pistes pratiques mais surtout des éléments psychologiques pour mieux comprendre les réactions futures de mon aîné.

J’avais envie de vous les faire partager. Mais comme de nombreux d’extraits m’ont paru importants, je ferai cela en 2 articles : le 1er aujourd’hui, le 2nd la semaine prochaine.

 

L’aîné est-il « grand » ?

Par la force des choses, l’aîné devient le « grand » de la fratrie. Mais quand le grand a moins de 3 ans , il reste un tout petit enfant avec des besoins d’attention encore très forts et cette promotion ne lui paraît guère profitable. Au-delà de 3 ans, la problématique est légèrement différente mais elle n’est pas plus aisée car l’enfant a longtemps pu profiter de ses parents pour lui seul, le bouleversement en termes d’attention est donc considérable également.

Plus grand que votre bébé mais encore petit

[…] Quoiqu’il en soit, ce n’est pas le moment pour votre grand de franchir les étapes que vous voudriez peut-être lui voir franchir. Il aura besoin que vous le considériez encore comme un bébé pendant un certain temps. Tentez de résister à la tentation de lui imposer un changement d’importance coïncidant avec la naissance. S’il a trois ans au moment où le dernier vient au monde, ce n’est pas forcément le bon moment pour lui d’aller à l’école, car il pourra alors se sentir complètement exclu. Attendez qu’il soit prêt avant de l’installer dans sa chambre, ou de lui faire vivre une promotion qui vous estimez valorisante parce qu’elle l’apparente à un grand.

Il devient clair que notre idée d’offrir à Pti Tonique un lit de grand l’été prochain risque de mal tomber. Nous comptions ainsi récupérer son lit à barreaux pour le nouveau-né. Mais si ce dernier partage notre lit quelques temps, le changement sera moins urgent pour Pti Tonique et nous pourrons peut-être, en installant les deux lits dans sa chambre, le laisser évoluer quelques temps de l’un à l’autre, de lui-même, au gré de ses envies et de sa maturité.

Ce que veut votre enfant plus que tout, c’est votre amour et votre attention. Les promotions ne l’intéressent pas vraiment dans une circonstance telle que la naissance de son frère ou de sa soeur. Au contraire, il vous faudra trouver un équilibre entre ses besoins qui pourront vous sembler régressifs et sa dignité humaine. En effet, il ne souffrira pas d’être considéré comme un petit, mais plutôt comme un grand qui a des besoins de petites et qui veut que cela soit respecté sans commentaires humiliants, désapprobateurs, ou ironiques. (page 60)

[…] Quand nous nous attendons à ce que notre enfant soit autonome, nous voudrions qu’il agisse seul. (page 61)

[…] Il a encore un très fort besoin de notre présence, de notre contact, de tout ce qui fait notre attention aimante, et il se retrouve quelquefois tout simplement hors jeu. Il était le premier et surtout l’unique enfant et subitement sa position change. Mais c’est surtout notre disponibilité à lui qui évolue, alors que son besoin est toujours le même et se manifeste avec d’autant plus d’acuité qu’il est différé sans cesse au profit du dernier. (page 63)

Sur le concept de « jalousie »…

Une fleur magnifique au parfum irrésistible

Vous ne devinez pas qui est cette belle plante ? C’est vous. Selon Bernard This et Hélène Sallez dans leur livre « Tous jaloux », vous exhalez l’odeur de la vie par le biais de la sécrétion hormonale et votre enfant est littéralement attiré par ces effluves qui lui rappellent son vécu passé. C’est pour cela qu’il veut être proche de vous plus que d’habitude. Ce n’est pas parce qu’il est déjà « jaloux », ne lui prêtez pas des intentions qui heurtent quelquefois sa dignité, c’est simplement pour retrouver de délicieux souvenirs qu’il se rapproche ainsi. (pages 48-49)

Je comprends mieux l’attitude « crampon » de mon fils depuis quelques semaines… Je ne l’avais pas pris pour de la jalousie anticipative mais plutôt pour une réaction au changement en moi qu’il sent certainement. Cependant, je ne m’étais pas fait une image aussi poétique de l’attirance semble-t-il irrésistible que lui procure mon « état » !!

Sortir de l’optique de compétition

Ce n’est pas l’arrivée d’un deuxième enfant qui met votre premier en insécurité, c’est votre disponibilité réduite et les attentes qui pèsent sur lui à partir du moment où vous vous mettez en tête qu’il est grand. Notre corps, par le biais des hormones, mais aussi notre tête accordent la priorité au dernier-né. Il est plus petit, plus fragile, il peut difficilement différer la satisfaction de ses besoins. Tout ceci est très juste, mais quand l’aîné a trois ans, ces règles-là lui sont également applicables.  Il a, lui aussi, des besoins impérieux, même s’il peut attendre un peu plus. Il a toujours autant besoin de contacts, d’attention exclusive, et toutes ses demandes se manifesteront d’autant plus sur le mode « bébé » qu’il aura l’impression de vivre une véritable pénurie d’attention et de soins. (page 68)

Comment réagir aux phénomènes de régression

Dans chaque situation de régression, essayez de voir ce que vous pourriez faire pour sauvegarder la dignité de votre enfant, et facilitez-lui la tâche. […l’auteure cite l’exemple du pipi au lit…] Résistez à la tentation de lutter contre les manifestations de régressions, car elles ont une fonction, accompagnez-les plutôt. Si votre enfant veut à nouveau être habillé par vous comme un bébé, et bien prenez-vous au jeu, et habillez-le en prenant bien soin de lui comme vous le feriez de votre nourrisson. C’est en le soutenant et en l’aidant qu’il traversera ces étapes en toute confiance. (page 78)

Des exemples de solutions

Dormir ensemble

Sur le plan matériel le « cododo » vous demandera un effort supplémentaire d’organisation. Votre lit est peut-être trop petit pour accueillir un bébé et un bambin. De plus, il est déconseillé de faire dormir un grand enfant directement aux côtés d’un nourrisson de moins d’un an, ce dernier pourrait être étouffé. Les bébés dorment généralement aux côtés de leur mère. Cette dernière peut se placer entre ses deux enfants, mais il y a d’autres formes d’organisation : le père peut dormir avec le plus grand et la mère avec le plus petit, ou bien le plus grand peut dormir sur un matelas au sol tandis que ses parents et le bébé dorment dans le lit.

Je rajouterais la possibilité de mettre le nouveau-né – le plus fragile – dans un lit de cododo (si on a fait le choix d’en acheter un) et de placer le grand entre les parents. Bien sûr, ces conseils s’adressent aux parents ayant fait le choix du cododo. Personnellement, je me posais justement des questions à ce sujet car lors d’angoisses nocturnes ou de maladies, Pti Tonique finit encore de temps en temps sa nuit entre son père et moi et je me questionnais sur l’organisation (et la place surtout !!! malgré notre lit en 160 de large) dans le lit pour protéger le nouveau-né du sommeil pour le moins agité de son frère !!! Nous verrons donc à l’usage mais j’ai à présent quelques pistes…

Le meilleur allié de l’aîné :  son père

Dans un couple, c’est la personne qui donne le moins de soins au bébé qui deviendra l’allié du grand. L’aîné a besoin d’un adulte qui prenne sa défense, qui soit son avocat, et qui l’aime inconditionnellement. Pour le bébé, la personne-ressource naturelle est la mère, qu’elle l’allaite ou pas. Il a passé neuf mois dans son ventre, et il a besoin d’elle.  (page 79)

Les parents qui travaillent

Donnez la priorité absolue aux besoins affectifs de vos petits (et de vos grands), c’est cela qui fera d’eux des adultes, de vrais adultes, pas d’éternels enfants blessés dans des corps d’adultes. par contre, il importera bien peu qu’ils aient pris un bain chaque jour et qu’ils aient eu une maison reluisante. Jamais, dans les groupes que j’ai animés je n’ai entendu : « Ma mère était très ordonnée, notre maison était très propre, c’était génial. » Ce que j’entends c’est plutôt : « Je n’ai aucun souvenir de ma mère et moi faisant des câlins, je ne me vois pas sur ses genoux, à aucun moment, elle était très occupée avec la maison et les autres enfants, toujours en train de faire quelque chose… ». (page 81)

Cet extrait m’a faite sourire… c’est pas faux quand on y réfléchit ! Même si dans le fond, c’est surtout nous qui n’aimons pas trop vivre dans le désordre et la saleté et souhaitons éviter les regards désapprobateurs qui pourraient en découler. Mais finalement, mis à part qu’il vaut mieux éviter que notre enfant mange des moutons de poussière à tous les coins de porte, c’est bien notre attention à lui qui restera gravé dans sa mémoire.

D’ailleurs, cela achève de me déculpabiliser de la fréquence à laquelle on fait la poussière… ma priorité, c’est que les sols et nos vêtements soient propres ! Et bien sûr de répondre aux demandes de mon fils – mais là, impossible de faire l’impasse dessus, il sait très bien se rappeler à nous.

La semaine prochaine, j’aimerais poursuivre ce partage en abordant la 2e moitié du livre et plus particulièrement la gestion des relations dans la fratrie, quand intervenir ou pas dans les conflits des enfants, comment régler ceux-ci par le jeu ou encore les difficultés que nous pouvons rencontrer en tant que parents lorsque certains événements de la vie de la fratrie nous renvoie à notre propre enfance.

Madame Sioux